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Vendredi 29 Mars 2024

L'Association ACP Legal

  • L'Ohadac et ACP Legal

    La notoriété mondiale et le succès du programme OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires) ont amené de très nombreux juristes, des entreprises et certains Gouvernements des Etats de la Caraïbe à réfléchir à la mise en place d'un programme d'unification du droit des affaires dans la Caraïbe reprenant la philosophie du précédent de l'OHADA.

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  • L'OHADAC en bref

    Plaquette réalisée par l'Association ACP Legal.

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PRINCIPES OHADAC RELATIFS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL

Article 9.1

Droits et actions susceptibles de prescription

Sauf disposition contraire, les droits et actions dérivant des contrats conclus s'éteignent par prescription à l'expiration d'un délai fixé conformément aux règles suivantes.

1. Portée de la prescription

En ce qui concerne la réglementation de la prescription, les systèmes romano-germaniques et ceux de tradition anglo-saxonne diffèrent, avant tout, quant à la dénomination et la nature qu'ils attribuent à cette institution. Ces différences sont représentées dans la région caribéenne.

Dans la zone OHADAC, les systèmes de tradition continentale ou romano-germanique, en particulier ceux qui relèvent du droit français, traitent conjointement de la prescription « acquisitive ou positive » et de la prescription « extinctive, négative ou libératoire ».

Les systèmes anglo-américains distinguent sous des énonciations différentes l'influence qu'exerce l'écoulement du temps sur les relations juridiques. L'expression « prescription » est généralement réservée au phénomène de consolidation en matière de propriété ou d'autres droits réels par l'écoulement du temps (Prescription Act, Chapter 158, des Bahamas : Prescription Act, Chapter 192, du Bélize : Limitation and Prescription Act, Chapter 252, de la Barbade : Prescription Act, Chapter 7:02, de la Dominique : Prescription Act de 1973 de la Jamaïque). Pour désigner l'effet protecteur ou inhibitoire de la prescription, permettant de se baser sur le simple écoulement du temps pour contrer une action, les termes limitation actions ou limitation periods sont communément employés. Dans ces systèmes, la réglementation, sur un plan davantage procédural, se tient en marge des règles substantielles d'ordre privé [Limitation Act 2000, Chapter L60, d'Anguilla : Limitation Act 1997 d'Antigua-et-Barbuda : Limitation Act 1995, Chapter 83, des Bahamas : Limitation of Actions Act, Chapter 173, de la Grenade : Limitation Act, Chapter 7:02, du Guyana : article 2.047 du code civil saint-lucien, Revised laws of Saint Lucia, 2006, Chap 4.01 : The limitation of Actions Act, part. IV (Debt and Contract) de la Jamaïque : Limitation Act, Chapter 2.12, de Montserrat : Limitation Act, Chapter 90, de Saint-Vincent-et-les-Grenadines : Limitation of Certain Actions Act, Chapter 7:09, de Trinité-et-Tobago : et Limitation of Actions Act, de la Jamaïque].

Dans les présents Principes, le terme « prescription » (sans qualificatif) vise l'influence que produit l'inaction prolongée dans le temps sur l'exercice des droits et créances dont dispose chaque partie au contrat. En tant que réglementation de caractère privé, les présents Principes ont pour objectif de garantir la souplesse et la sécurité des échanges juridiques. La co-existence au niveau international de plusieurs systèmes disposant de différentes alternatives et options de réglementation portant sur le socle même de la prescription (objet, régime objectif et subjectif dans le décompte des délais, interruption versus suspension, délais de forclusion, effet extinctif ou simplement de protection, portée de l'autonomie de la volonté, effets des garanties protégeant les droits, etc.) constitue un frein et un obstacle sérieux au commerce international. Ainsi, il est nécessaire qu'une convergence ait lieu entre les différents systèmes, et en particulier entre le modèle romano-germanique et celui anglo-américain, au moyen de la proposition de règles uniformes qui peuvent être essentiellement partagées par toutes les familles juridiques faisant partie de l'OHADAC.

Cette convergence entre les systèmes influe sur le débat relatif à la nature procédurale ou substantielle de la prescription et au caractère impératif ou dispositif de ses règles. La tendance claire en matière de contrats internationaux porte sur une qualification substantielle, comme question « contractuelle », tel qu'il en résulte de l'article 12 du Règlement (CE) 593/2008, du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I).

2. Objet de la prescription dans les systèmes nationaux de l'OHADAC

Les règles relatives à la prescription posent une question préliminaire quant à son objet : s'agit-il des actions (claim, en anglais, rechtsvordering, en néerlandais) ou des droits (rights en anglais, rechts, en néerlandais) : Si le centre de gravité se situe dans les droits, la prescription entraine leur extinction. Si elle influe sur le pouvoir de les exercer, la prescription ne permet au titulaire que d'adopter un comportement de rejet face à une action intempestive, c'est-à-dire que le débiteur demeure obligé bien que les modalités de réclamation de l'action aient été dénaturées. Dans le premier des cas susmentionnés, la prescription affecte le droit lui-même en provoquant son extinction, et défend même l'automatisme ou l'extinction ipso iure du droit. Au contraire, maintenir que la prescription ne porte pas sur le droit mais sur l'action, qui est le moyen de faire valoir son droit en justice, suppose qu'une fois la prescription vérifiée, le droit subjectif subsisterait mais sans aucune tutelle judiciaire.

Dans la common law, l'expression limitation actions, qui insiste sur la nature procédurale de l'institution, témoigne de la position générale du système anglo-américain, qui reconnait que la prescription a pour objet non pas le droit subjectif, mais l'action, comprise comme le droit de demander à qui de droit ou la satisfaction du droit par un comportement actif ou passif [Limitation Act 1980 anglais et paragraphe 2.93 du rapport de la English Law Commission, présenté au Parlement en 2001 (The Law Commission - Law Com, n° 270-, Limitation of actions. Item 2 of the Seventh Programme of Law Reform-]. Ce point de vue fait subsister le droit subjectif après l'expiration du délai de prescription, bien que le bénéficiaire puisse refuser d'exécuter la prestation ou s'opposer d'une autre manière à l'exercice du droit (dans le même sens, voir § 194.1 et § 214.1 BGB). Néanmoins, au Royaume-Unis, le Prescription and Limitation Act 1973 écossais s'éloigne de cette conception.

Les territoires de droit néerlandais disposent d'une réglementation découlant de l'article 3:306 du code civil néerlandais, qui ramène la prescription à l'exercice des droits au moyen d'actions (article 3:306 du code civil surinamais).

Certains systèmes juridiques de langue espagnole et certains territoires de tradition française ou sous influence du droit français ont opté pour une solution différente. La prescription y est un mode d'extinction des actions ou des droits (articles 1.625 et 2.512 du code civil colombien : articles 633, 865, 866 et 868 du code civil costaricain : article 112 du code civil cubain : article 2.219 des codes civils français et dominicain : article 1.501 du code civil guatémaltèque : article 2.263 du code civil hondurien : article 1.684 du code de commerce hondurien : article 1.698 du code civil panaméen, article 1.830 du code civil portoricain, article 1.069 du code civil saint-lucien) ou un mécanisme permettant de se libérer de l'exécution des obligations (article 1.135 du code civil mexicain, articles 868 et 869 du code civil nicaraguayen, article 1.952 du code civil vénézuélien et article 2.047 du code civil saint-lucien).

3. La prescription dans les textes d'harmonisation du droit contractuel

L'intérêt d'établir une réglementation relative à la prescription apparait invariablement dans tous les textes internationaux d'unification du droit contractuel comme un mécanisme permettant de résoudre les conflits qui, dans les opérations de commerce international, présentent des divergences entre les différents systèmes en ce qui concerne la base conceptuelle, les délais et les effets de la prescription.

Dans ces textes, la prescription ne produit pas automatiquement un effet extinctif, mais permet au bénéficiaire de l'utiliser comme moyen de protection contre la réclamation ou l'exercice procédural de l'action par le créancier. C'est le cas de la Convention de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) sur la prescription en matière de vente internationale de marchandises de 1974 (ci-après convention de la CNUDCI), qui établit des règles uniformes relatives au délai dans lequel les parties à un contrat de vente internationale de marchandises peuvent faire valoir une action émanant du contrat, liée à son inexécution, à sa résiliation ou à sa validité. Il faut cependant prendre en compte que cette convention, entrée en vigueur le 1er août 1988, est d'une efficacité limitée dans le domaine géographique de l'OHADAC, vu qu'elle n'a été ratifiée que par peu d'États (Cuba, États-Unis, Mexique et République Dominicaine), ce qui justifie que les Principes OHADAC établissent un traitement spécifique de la matière.

La prescription fait l'objet d'une attention particulière dans le chapitre 10 des Principes d'UNIDROIT, dans la partie III des PECL et dans le chapitre 7 du livre III du DCFR qui, avec de légères nuances, reprennent les dispositions des PECL. Tous ces textes tendent ouvertement à ce que l'on pourrait dénommer la conception protectrice de la prescription. C'est le critère qu'ont adopté les Principes d'UNIDROIT, qui configurent la prescription comme une limite à l'exercice des droits (article 10.1) et affirment de manière expresse que l'expiration du délai de prescription n'éteint pas le droit (article 10.9). Les PECL (articles 14:101 et 14:501) et le DCFR (article III-7:101) vont également dans ce sens. Terminologiquement, les PECL visent les « claims subject to prescription », tandis que le DCFR utilise les « rights subject to prescription » comme dénomination générale.

Cette même conception existe dans la Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un droit commun européen de la vente (2011), qui prévoit, comme effet de la prescription, que « le débiteur est fondé à refuser d'exécuter l'obligation en cause et le créancier perd tous les moyens d'action possibles en cas d'inexécution sauf la suspension de l'exécution » (article 185 CESL).

4. Portée de la prescription dans les Principes OHADAC

Une fois les différentes optiques conceptuelles sur la prescription analysée, le point le plus notable du débat, sans aucun doute, ne porte pas sur ce que sera l'objet mais sur les conséquences qui en découlent. Et il est certain que les effets qui découlent de chacune de ces conceptions (renonciation à la prescription obtenue, admissibilité ou non de la répétition de la dette prescrite spontanément acquitté, opposabilité de l'action prescrite par voie de compensation, appréciation ou non d'office de la prescription, etc.) ne présentent pas toujours une bonne cohérence.

D'un côté, la prescription étant conçue comme un phénomène provoquant l'extinction de droits, il est difficile de justifier certaines dispositions telles que la nécessité de son invocation, la possibilité de renoncer à la prescription expirée et le rétablissement conséquent du droit prescrit ou l'irrépétibilité du paiement une fois le délai de prescription expiré.

D'un autre côté, si la prescription est conçue comme un instrument de protection dont l'appréciation relève uniquement des parties, il n'est pas aisé d'interdire la modification des délais de prescription ou d'appliquer le principe accessoire par voie conventionnelle, de sorte que, une fois que la prescription est invoquée pour la demande principale, ses effets s'étendent à des demandes relatives aux prestations accessoires.

La règle ici proposée, fidèle au consensus minimum des présents Principes, répond à ce qui peut être considéré comme le socle commun à cette institution dans les pays faisant partie de l'OHADAC : la prescription influe sur les pouvoirs concrets découlant de la conclusion du contrat que chacune des parties peut exercer à l'égard de l'autre. La règle porte sur la prescription des droits et des actions que les parties peuvent exercer dans le cadre du contrat, qui englobent non seulement les droits principaux qui appartiennent aux parties au contrat conformément aux présents Principes (demander l'exécution, exercer tout recours découlant de l'inexécution, faire valoir l'invalidité du contrat), mais aussi ceux qui naitront de l'accord contractuel pour chacune d'entre elles, comme, par exemple, l'exécution d'une clause pénale.

Exemple : Dans un contrat de prestation de services de conseil entre le consultant A et l'entreprise B, qui se consacre à la fabrication de produits informatiques, il est inséré une clause de confidentialité par laquelle A s'engage à ne révéler aucune information sur le processus de production de l'entreprise B, stipulant, qu'en cas d'inexécution, et en plus de l'indemnisation correspondante, sera dû le paiement d'une somme d'un million d'euros. L'action en dommages et intérêts ainsi que celle en réclamation de la peine sont soumises au délai de prescription.

Commentaire

Article 9.2

Délais de prescription

1. Le délai général de prescription est de trois ans à compter du jour où une partie a connu ou aurait dû raisonnablement connaitre les faits lui permettant d'exercer son droit.

2. Les parties peuvent convenir d'une réduction ou d'un allongement des délais de prescription, dans la limite d'un an au minimum et de dix ans au maximum.

3. Le délai maximum de prescription est de quinze ans à compter du jour où le droit aurait pu être exercé, et ce nonobstant l'ignorance des faits ayant permis son exercice, et quels que soient les accords des parties ou l'existence de causes de suspension.

1. Le délai de prescription et l'autonomie de la volonté dans les systèmes nationaux de l'OHADAC

Il existe trois éléments clés de la configuration de la prescription dans chaque système : la durée des délais de prescription : le moment à compter duquel ils commencent à courir : et la marge de manÅ“uvre laissée à l'autonomie de la volonté pour les modifier.

Dans une grande partie des systèmes nationaux de langue espagnole faisant partie de l'OHADAC ou dans ceux d'influence romano-germanique, il existe différents délais de prescription. C'est pourquoi il en existe un général, qui a comme point de départ un critère objectif, la règle de la actio nata, c'est-à-dire le moment où le droit ou la créance peuvent être exercés ou sont exigibles. En général, dans ces systèmes, le régime ne peut pas être modifié par la volonté des parties.

La durée des délais établis à titre général diffère beaucoup : 3 ans (article 1.151 du code de commerce nicaraguayen) : 4 ans (article 984 du code de commerce costaricain) : 5 ans (article 2.536 du code civil colombien : article 868 du code civil costaricain : article 114 du code civil cubain : article 943 du code de commerce cubain : article 1.502 du code civil guatémaltèque : article 1.708 du code de commerce hondurien : article 1.650 du code de commerce panaméen) : 10 ans (article 2.292 du code civil hondurien : article 1.159 du code civil mexicain : article 1.047 du code de commerce mexicain : article 1.977 du code civil vénézuélien : article 132 du code de commerce vénézuélien) : et finalement, 15 ans (article 1.864 du code civil portoricain). Dans certains cas, le délai en matière contractuelle est supérieur à celui de la matière commerciale. C'est le cas des 7 ans établis dans l'article 1.701 du code civil panaméen (contre 5 ans dans le code de commerce), ou des 10 ans prévus dans l'article 2.292 du code civil hondurien, contre 5 ans dans le code de commerce.

Le décompte commence, en règle générale dans ces systèmes, à partir du moment où l'action a pu être exercée (article 2.535 du code civil colombien : article 874 du code civil costaricain : article 969 du code de commerce costaricain : article 2.297 du code civil hondurien : article 1.685 du code de commerce hondurien : article 1.159 du code civil mexicain : article 1.040 du code de commerce mexicain : article 1.650 du code de commerce panaméen) ou, lorsqu'il s'agit d'une demande invoquée dans le cadre d'un procès, à partir du jour où la décision devient définitive (article 873 du code civil costaricain : article 986 du code de commerce costaricain : article 120.1 et 2 du code civil cubain : article 2.299 du code civil hondurien : article 1.871 du code civil portoricain). Dans certains cas, pour certaines actions en inefficacité ou en dommages et intérêts extracontractuels, le début du décompte dépend du moment où la cause de l'inefficacité ou des dommages est connue (article 120.3 et 4 du code civil cubain).

Dans la majorité de ces systèmes nationaux de langue espagnole, aucune règle n'est expressément énoncée, ni comme interdiction ni comme autorisation, quant à la portée de l'autonomie de la volonté en matière de prescription, ce qui laisse supposer que la validité des accords reste soumise aux clauses générales (bonne foi, ordre public). Cela conduit à distinguer les clauses qui supposent un prolongement des délais de celles qui gèrent une réduction leur durée légale. En ce qui concerne les premières, le principe de non-renonciabilité de la prescription en vigueur dans certains systèmes conduit à considérer comme contraires à l'ordre public et donc interdits les accords établissant l'imprescriptibilité ou les accords de prolongement dont la durée excessive représente, dans la pratique, une véritable imprescriptibilité. En revanche, les accords de réduction des délais sont valides, à condition de respecter les exigences de bonne foi et le juste équilibre des prestations, afin de ne pas priver le titulaire de la créance ou du droit de sa possibilité d'agir. Cependant, certains systèmes nationaux disposent expressément que l'interdiction de modifier les délais est régie par accord entre les parties. C'est le cas des articles 1.158 et 1.686 du code de commerce hondurien.

Dans les territoires sous influence du droit français, de longs délais sont généralement prévus, à l'instar du code civil issu de la loi n° 2008-561, du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile. C'est le cas des 20 ans établis par l'article 2.262 du code civil dominicain et par l'article 2.030 du code civil haïtien. Néanmoins, la nouvelle réglementation du code civil français, opérée par la loi 2008-561 du 17 juin, introduit d'importantes innovations dans le régime de la prescription. En premier lieu, elle réduit sensiblement la durée, le nombre de prescriptions ainsi que la pluralité de délais. En second lieu, en ce qui concerne le décompte, elle adopte un point de départ subjectif : le jour ou le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l'exercer (vid. article 2.224 du code civil français, pour les actions personnelles ou mobilières, et article 2.227 du code civil français, pour les actions réelles et immobilières), à certaines exceptions près (articles 2.225, 2.226 et 2.232 du code civil français). Dans tous les cas, l'article 2.232 du code civil français limite la durée maximale en indiquant que ni le critère subjectif fixé comme point de départ, ni la suspension ou l'interruption de la prescription ne peuvent conduire, à quelques exceptions près, à ce que le délai de prescription dépasse les vingt ans à compter de la naissance du droit. Finalement, un large champ d'action est laissé à l'autonomie de la volonté (article 2.254 du code civil français).

Dans le domaine de la common law, les échanges internationaux sont généralement accompagnés de délais de prescription courts. Cette situation est caractéristique des territoires de l'OHADAC de droit anglais ou sous influence directe de ce droit, dont la législation particulière en matière de limitation actions prévoit des délais d'entre 4 et 6 ans qui courent à compter du moment où le droit peut être exercé (articles 3.4 et 7 du Limitation Act 1997 d'Antigua-et-Barbuda : section 3.1 du Limitation of Certain Actions Act de Trinité-et-Tobago : section 7 du Limitation Act des Bermudes : section 4 du Limitation Act de Montserrat) ou de l'arrêt devenu définitif (article 2.10.a du Limitation Act 1997 d'Antigua-et-Barbuda : section 3.2 du Limitation of Certain Actions Act de Trinité-et-Tobago : section 26 du Limitation Act des Bermudes). Le critère du Limitation Act anglais de 1980 est donc suivi, établissant pour les cas d'inexécution ou de préjudice subi un délai de 6 ans à compter de la date de « the cause of action accrued ». C'est la règle qui prévaut en droit anglo-saxon, qui opte cependant pour le critère subjectif dans certains cas. Le Limitation Act anglais exige la possibilité de connaitre les faits lorsqu'il s'agit de actions in respect of personal injuries (section 11), celles relatives aux produits défectueux (section 11 A) ou des actions under fatal accidents legislation (section 12), ou, dans les cas de fraude, de la dissimulation ou de l'erreur (section 32). Dans le même sens, voir section 12 du Limitation Act des Bermudes : section 5 du Limitation of Certain Actions Act, Chapter 7:09, de Trinité-et-Tobago : section 11 du Limitation Act du Guyana : section 36 du Limitation Act des Bahamas : section 29 du Limitation Act 1984 des Bermudes : section 21 du Limitation Act, Chapter 2.12, de Montserrat.

La Law Commission anglaise (paragraphe 3.5 du rapport n°270 - Limitation of actions) propose de généraliser la fixation de « the date of knowledge » (critère subjectif) comme point de départ de la prescription, indiquant, en outre, les faits que le demandant devra connaitre, bien que le délai de prescription ne pourra dépasser les 10 ans à compter de la naissance du droit d'agir (sauf en ce qui concerne les personal injuries claims). Dans tous les cas, la Law Commission opte pour l'admissibilité de modifications conventionnelles du régime de prescription (paragraphe 3.175), mais avec certaines limites, non pas concernant la durée minimale ou maximale des délais, mais qui découlent des règles de protection du consommateur.

Aux États-Unis, les délais découlant de l'inexécution contractuelle diffèrent d'un État à l'autre, variant entre des périodes allant de 3 à 15 ans. Dans la majorité des États, les délais de prescription sont généralement plus courts pour les contrats verbaux que pour les contrats écrits. À titre général, le décompte des délais de prescription part d'une donnée objective, c'est-à-dire qu'il commence dès que les faits donnant lieu à l'exercice de l'action se sont produits, qu'ils soient connus ou non. Néanmoins, l'évolution du système nord-américain vers des critères subjectifs est connue, à travers la doctrine jurisprudentielle de la « delayed discovery doctrine » ou « discovery rule », qui considère que l'action ne nait qu'à compter du jour où le demandeur a connaissance, ou devrait avoir connaissance, de certains faits lui permettant de déposer la demande. C'est le critère retenu par la section 2-725 de l'UCC, en ce qui concerne l'action pour inexécution de tout contrat de vente, dont le délai est de 4 ans. Les parties peuvent réduire ce délai jusqu'à 1 an, mais pas de convenir de l'augmenter. L'admissibilité de la modification contractuelle des délais dans les transactions commerciales fait l'objet de décisions judiciaires favorables dans certains États. C'est le cas notamment de l'arrêt de la Cour suprême du Massachussetts de l'affaire Creative Playthings Franchising Corp v Reiser (SJC-11026, Mass. November 21, 2012), qui a considéré que les accords contractuels relatifs au raccourcissement des délais de prescription, à condition d'être « raisonnables », ne sont pas contraires à l'ordre public.

Les territoires de droit néerlandais disposent d'une réglementation découlant du code civil néerlandais, qui a réduit le délai maximum de trente à vingt ans (article 3:306 des codes civils néerlandais et surinamais) et a généralisé celui de cinq ans (articles 3:308, 3:309, 3:310 et 3:311), en particulier en ce qui concerne les obligations découlant de l'inexécution contractuelle (article 3:307), à moins que le droit ne découle d'une décision judiciaire ou arbitrale. Dans ce cas, le délai est ramené à vingt ans à compter du jour suivant celui où la décision devient définitive (article 3:324). À titre général, le critère de la actio nata est adopté, c'est-à-dire le moment où le droit ou l'action est exigible (articles 3:307, 3:308, 3:313, 3:314 et 3:315), aussi le décompte du délai se trouve hors du champ d'application de cette règle pour les actions en dommages et intérêts dépendant d'un critère objectif (article 3:310 : 5 ans à compter du moment où le préjudice ainsi que l'identité du responsable sont connus) bien que dans tous les cas il soit limité par un délai de forclusion de 20 ans à compter du jour où le préjudice est survenu.

2. Délais de prescription et autonomie de la volonté dans les textes internationaux

Dans les textes internationaux d'unification du droit contractuel, une tendance claire de simplification de réduction des délais est observable. Ils visent de cette manière à clarifier le régime de la prescription en unifiant les délais et en réduisant leur durée. À titre général, des périodes générales ou ordinaires de prescription relativement courtes sont fixées : 3 ans (article 10.2 PU : article 14:201 PECL : article III-7:201 DCFR) ou 4 ans (article 8 de la convention relative à la prescription). Néanmoins, les PECL et le DCFR étendent le délai à 10 ans lorsqu'il s'agit de demandes judiciaires ou arbitrales (article 14:202 PELC : article III-7:202 DCFR).

Quant au dies a quo pour le décompte des délais, avec une forte teinte objective, au niveau international, la convention de la CNUDCI (articles 9 à 12) fixe, à titre général, le début du délai de prescription à la date où l'action peut être exercée, bien qu'elle prévoie aussi des périodes subjectives (p. ex. la date à laquelle le dol a été ou aurait pu être raisonnablement découvert). Dans tous les cas, l'article 23 de la convention relative à la prescription établit une limite générale : le délai de prescription expirera au plus tard au bout de dix ans à compter de sa date de commencement. Néanmoins, la tendance la plus récente dans les textes internationaux consiste en une combinaison de délais relatifs, courts et à caractère subjectif (basé sur la connaissance du demandeur ou du titulaire concerné de certaines informations concernant la demande) avec des délais absolus, plus longs et basés sur des critères objectifs, appelés délais de forclusion, qui visent à éviter qu'en raison du décompte objectif des délais ou de l'interférence de causes d'interruption ou de suspension, la prescription ne se prolonge excessivement (article 10.2 PU : article 14:301 PECL : article III-7:301 DCFR : article 180 CESL).

Une fois les délais et décomptes établis, ces textes diffèrent cependant en ce qui concerne l'autonomie de la volonté. La convention de la CNUDCI consacre expressément l'interdiction de modification conventionnelle du régime de la prescription (article 22.1). Il s'agit là d'une stipulation à rattacher au paragraphe III du Préambule des présents Principes, qui influe sur les effets d'imposer aux parties le régime de prescription établi dans les présents Principes lorsqu'il s'agit de ventes internationales de marchandises et qui concernent les tribunaux et la législation des États de la Caraïbe : Cuba, les États-Unis, le Mexique et la République Dominicaine. L'application des présents Principes doit cependant être comprise comme une exclusion expresse par les parties de l'application de la convention relative à la prescription, conformément à son article 3.2.

Dans les textes internationaux les plus récents apparait au contraire la possibilité tout à fait favorable permettant de façon modérée les accords relatifs à la prescription, même s'ils ont une portée différente (article 10.3 PU : article 14:601 PECL : article III-7:601 DCFR : article 186 CESL).

3. Délais, décompte et autonomie de la volonté dans les Principes OHADAC

La réglementation proposée dans les Principes OHADAC relatifs aux contrats du commerce international répondent à la nécessité de trouver un point de ralliement entre les systèmes qui garantissent le plus de fluidité dans les échanges commerciaux internationaux, ce qui nécessite une réduction des délais de prescription prévus par certains systèmes ainsi qu'une plus grande sécurité pour les opérateurs internationaux.

Il a été considéré qu'il est inapproprié de suivre le chemin emprunté par certains droits nationaux, établissant des délais de prescription excessivement longs. Cette possibilité légale est une source d'insécurité dans les transactions commerciales internationales et, de plus, elle entre frontalement en conflit avec la culture juridique des pays de common law.

Des degrés plus élevés de sécurité juridique s'obtiennent par le jeu combiné de deux délais (général et maximum) qui permettent, au regard du critère de décompte prévu, d'équilibrer les intérêts des parties au litige. Le décompte du délai général ou volontaire débute à partir de la connaissance ou de la possibilité de connaitre certains éléments (critère de la possibilité de connaitre en faisant preuve de diligence raisonnable) assure la position de l'une des parties au contrat mais présente une grande insécurité pour celle qui invoque la prescription et doit prouver l'événement constituant le point de départ, étant donné les difficultés que peut poser la détermination du dies a quo et la preuve de la connaissance de certains faits par l'autre partie. Néanmoins, un équilibre est atteint en prévoyant un délai plus large et dont le décompte fait abstraction de la connaissance ou non de l'existence de l'action par son titulaire et de la situation personnelle de celui-ci. La finalité de ce délai maximum consiste à éviter que, pour des raisons de décompte subjectif, de suspension ou de renouvellement du délai, la prescription ne se prolonge excessivement et que cela nuise à la sécurité juridique. La prescription aura lieu dans tous les cas après l'écoulement de ce délai maximum, afin de rééquilibrer toute incertitude que peuvent provoquer les éléments subjectifs introduits dans le régime de la prescription.

La question se pose de savoir si la durée prévue par les présents Principes pour le délai général (trois ans) et pour le délai maximum (quinze ans) est la plus appropriée. En principe, ces deux délais semblent suffisants, raisonnables et adaptés à une réglementation visant la transparence et la souplesse des transactions juridiques transfrontalières dans la région.

Exemple : Le 10 mai 1995, l'entreprise A charge l'entreprise B de construire et d'installer un équipement industriel, stipulant dans le contrat une indemnisation si à un quelconque moment de la durée de vie de l'équipement, sa production est inférieure à 200 000 unités et à un certain niveau de qualité. Le 10 mai 2005, suite à une vérification annuelle de qualité, il est détecté que le niveau de qualité des unités produites ne correspond pas à ce qui a été convenu. A peut exiger l'indemnisation convenue dans un délai de 3 ans à compter du 10 mai 2005, moment où il a eu connaissance des faits, bien que la baisse de qualité soit antérieure.

Il n'est cependant pas conseillé d'imposer cette réglementation de caractère impératif. Il semble plus convenable de laisser une certaine liberté aux parties pour moduler le délai général, garantissant ainsi l'équilibre contractuel et la sécurité juridique en établissant une période maximum et minimum.

CLAUSES RECOMMANDÉES

Clause de modification du délai général des contrats d'ingénierie

« En application de ce contrat, aucune action ni aucune procédure ne pourra être engagée à l'encontre du fournisseur de services ou de l'entrepreneur après : (a) le délai d'un an à compter de la date à laquelle la prestation de service s'est achevée : ou (b) dans le cas où cette situation ne se produirait pas, le délai d'un an à compter de la date à laquelle le dernier service relatif au projet a été réalisé. »

Commentaire

Article 9.3

Suspension de la prescription

1. Le délai de prescription général ou conventionnel est suspendu par l'ouverture d'une procédure judiciaire, arbitrale, de médiation ou de toute autre nature portant sur le droit en question, ainsi que par l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité ou de dissolution du débiteur à l'encontre duquel une partie exerce son droit. La suspension est prolongée jusqu'au prononcé de la décision définitive ou au terme de la procédure.

2. La mort ou l'incapacité d'une partie au contrat ainsi que l'existence de circonstances raisonnablement imprévisibles et irrésistibles qui empêchent l'exercice d'un droit constituent des causes de suspension du délai de prescription jusqu'à la désignation d'un héritier ou d'un représentant ou jusqu'à la disparition de l'obstacle qui empêche l'exercice du droit.

3. L'ouverture d'une procédure de négociation entre les parties sur le droit ou sur les circonstances donnant lieu à l'exercice de ce droit suspend le délai de prescription jusqu'à ce que six mois se soient écoulés à compter de la dernière communication faite au cours de la négociation ou jusqu'à ce qu'une partie ait communiqué à l'autre son refus de poursuivre la négociation.

4. La suspension de la prescription en arrête temporairement le cours sans effacer le délai déjà couru.

1. La rupture du délai de prescription : interruption, suspension, prorogation

Tous les systèmes prévoient les faits et les situations qui affectent le déroulement des délais de prescription et qui peuvent produire différents effets, allant d'une simple prolongation du délai prévu initialement au commencement d'un nouveau délai.

Les systèmes du modèle romano-germanique distinguent traditionnellement deux formes basiques de rupture du délai de prescription : l'interruption et la suspension. Tandis que l'interruption détermine l'inutilité d'un délai de prescription écoulé et marque le début d'un nouveau délai, généralement de même durée que le premier, la suspension paralyse ou interrompt le délai, qui reprend et se poursuit après que la cause de la suspension s'interrompt. La différence entre l'événement suspensif et interruptif consiste donc en la « reprise » du délai de prescription dans le premier cas, et de son « recommencement » dans le deuxième.

Dans une large mesure, les situations ou événements interruptifs coïncident dans les territoires de l'OHADAC de droit continental. Cela est principalement vrai pour l'exercice judiciaire du droit et la reconnaissance par le débiteur du droit du créancier.

Les effets de la suspension étant plus faibles sur le délai de prescription, ils font qu'elle est plus largement reconnue par les différents systèmes, ayant conféré une force spéciale à la règle formulée à travers l'aphorisme « contra non valentem agere non currit prescritio », dont le sens est clairement repris dans le nouvel article 2.234 du code civil français (2008).

Bien que les causes de la suspension prévues par les différents systèmes soient multiples et variées, elles obéissent généralement à des cas où, pour toute cause justifiée, le titulaire ne peut pas exercer son droit d'action. En premier lieu, il existe des situations objectives ou des empêchements hors du contrôle du titulaire de la demande qui l'empêchent de l'exercer, principalement la force majeure (article 2.234 du code civil français : article 2.530 du code civil colombien : article 123 du code civil cubain). En second lieu, un motif fréquent est l'héritage ou la succession en déshérence (article 2.237 du code civil français : article 880 du code civil costaricain : article 10.8 (2) PU). En troisième lieu, sont retenues les situations subjectives, personnelles ou familiales du titulaire de la demande ou de l'action qui entravent son exercice, comme : la minorité ou l'incapacité sans représentant légal ou, en cas de représentation légale, les actions réciproques entre représentants et représentés [article 2.235 du code civil français et article 59 de l'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013 : article 2.530 du code civil colombien : article 880 du code civil costaricain : article 976 du code de commerce costaricain : article 2.252 du code civil dominicain : article 1.505 du code civil guatémaltèque : article 1.691 du code de commerce hondurien : article 2.020 du code civil haïtien : article 1.166 du code civil mexicain : article 931 du code civil nicaraguayen : article 2.093 du code civil saint-lucien : article 1.965 du code civil vénézuélien]. L'existence d'un mariage ou d'un concubinage, en lien avec les demandes entre époux et concubins (article 2.236 du code civil français : article 123 du code civil cubain : article 1.505 du code civil guatémaltèque : article 1.691 du code de commerce hondurien : article 1.167 du code civil mexicain : articles 2.094 à 2.096 du code civil saint-lucien) : la mise en administration de biens déterminés ou les relations entre les personnes morales et leur directeur ou représentant, en lien avec les relations réciproques entre ceux dont les biens ont été mis en administration et ceux qui les ont mis en administration ou entre les personnes morales et leur représentant (article 976 du code de commerce costaricain : article 1.691 du code de commerce hondurien) : l'ignorance ou la méconnaissance par le créancier de l'identité du débiteur ou des circonstances justifiant sa réclamation (article 14:301 PECL : article III-7:301 DCFR) : la dissimulation dolosive de la dette (article 880 du code civil costaricain : article 976 du code de commerce costaricain : article 1.691 du code de commerce hondurien : article 931 du code civil nicaraguayen).

Le report de l'échéance (prorogation de l'échéance, augmentation de la prescription), qui s'est développé dans certains systèmes, est différent de l'interruption et de la suspension. Son effet ne constitue pas une rupture du délai mais un prolongement du moment de l'expiration du délai de prescription, de sorte que la fin du délai n'intervient qu'à partir de l'expiration d'un certain laps de temps en sus du délai initial. C'est la solution choisie par le code civil néerlandais (articles 3:320 et 3:321) pour la plupart des causes de suspensions analysées ci-dessus. L'extension (verlenging van de verjaring), qui suppose l'existence de certaines de ces situations subjectives ou objectives, à la date d'échéance de la période de prescription ou dans ses six derniers mois, détermine son prolongement jusqu'à ce que s'écoulent six mois à compter de la cause de prorogation. C'est également la proposition formulée dans la section 28 du Limitation Act anglais pour les cas de handicap, et le mécanisme utilisé dans les territoires sous influence du droit anglais pour les cas de mort (section 11 du Limitation Act Guyana), d'incapacité ou de minorité (section 11 du Limitation Act du Guyana : section 42 du Limitation of Actions Act, Chapter 173 de Grenade : section 36 du Limitation Act des Bahamas : section 29 du Limitation Act 1984 des Bermudes : section 21 du Limitation Act de Montserrat : section 11 du Limitation of Certain Actions Act de Trinité-et-Tobago).

2. La suspension comme règle générale dans les textes internationaux

L'interruption, la suspension et l'allongement apparaissent avec une intensité différente dans les textes d'harmonisation du droit des contrats. Ils reconnaissent une certaine marge d'allongement de la période de prescription ou de report de l'échéance. La prolongation est prévue, en premier lieu, pour les cas où les parties négocient la demande ou les circonstances qui pourraient donner lieu à la naissance d'une demande, de sorte que le délai de prescription ne parviendra pas à échéance tant que le délai d'un an ne se sera pas écoulé après la dernière communication intervenue au cours des négociations (article 14:304 PECL : article 182 CESL). En second lieu, pour les cas d'incapacité sans représentation, dans lesquels le délai de prescription allant à l'encontre ou en faveur de la personne ne s'éteindra pas tant que le délai d'un an ne se sera pas écoulé après la disparition de l'incapacité ou la désignation d'un représentant (article 14:305 PECL : article III-7:305 DCFR). Enfin, dans les cas de décès du créancier ou du débiteur, le délai de prescription d'une créance au bénéfice ou au détriment de l'héritage ne s'éteindra pas tant que le délai d'un an ne se sera pas écoulé après que la créance ait été exécutée au bénéfice ou au détriment d'un héritier ou d'un représentant de la masse héréditaire (article 14:306 PECL : article III-7:306 DCFR).

Il convient de souligner que ces textes convertissent en règle générale la suspension de la prescription plutôt que son interruption. En effet, ils établissent comme cas de suspension : les cas de force majeure, de mort ou d'incapacité (article 10.8 PU : article 14:303 PECL : article III-7:303 DCFR : article 21 de la convention de la CNUDCI), les cas où le créancier ignore ou ne pouvait pas raisonnablement connaitre l'identité du débiteur ou les faits ayant donné naissance à la créance, y compris, dans les cas d'indemnisation en dommages et intérêts, le type de dommage causé (article 14:301 PECL : article III-7:301 DCFR), l'ouverture par le créancier d'une procédure judiciaire ou extrajudiciaire afin de réclamer sa créance (article 13 de la convention de la CNUDCI : articles 10.5 et 10.6 PU : article 14:302 PECL : article III-7:302 DCFR) ou les procédures visant à éviter l'insolvabilité du débiteur (article 10.5 PU et article 181 CESL).

L'interruption et la reprise qui s'ensuit du délai jouent un rôle résiduel dans les cas de reconnaissance de la dette par le débiteur (article 10.4 PU : article 14:401 PECL : article III-7:401 DCFR : article 184 CESL) et dans le cas où le débiteur tente d'obtenir l'exécution par voie exécutoire (article 14:402 PECL : article III-7:402 DCFR).

3. La suspension dans les Principes OHADAC

Indépendamment de l'effet du délai de prescription, il existe un point commun à tous les systèmes : les procédures judiciaires, arbitrales ou de résolution alternative des litiges ainsi que les événements subjectifs ou objectifs, étant hors de son contrôle et n'étant pas prévisibles. Ils empêchent l'une des parties au contrat d'exercer ses droits et influent sur le déroulement du délai de prescription. La règle contenue à l'article 9.3 vise à associer de façon harmonieuse le régime de rupture des délais de prescription dans les systèmes romano-germaniques et de common law présents dans la Caraïbe, reconnaissant l'influence de ces situations sur les délais de prescription.

Parmi les options possibles (interruption/suspension/allongement), celle qui a été adoptée dans la présente réglementation répond au besoin d'édicter une règle acceptable pour tous les systèmes de la zone OHADAC et une solution adéquate pour une réglementation destinée à assouplir les transactions juridiques transfrontalières de la région. Il n'est pas recommandé d'attribuer à ces évènements un effet interruptif, car cette déclaration à effets rétroactifs serait excessivement démesurée pour le débiteur. L'existence d'une procédure judiciaire ou autre ou aussi d'un événement échappant au contrôle du titulaire de la demande produira des effets purement suspensifs. Cet effet est reconnu expressément durant les négociations entre les parties.

En ce qui concerne le premier groupe de causes qui, conformément aux présents Principes, provoquent la suspension (procédure judiciaire, arbitrale, de médiation ou tout autre type d'actions), il a été choisi de reconnaitre un effet suspensif à l'ouverture de l'une quelconque de ces procédure conformément à la lex fori, y compris si l'action exercée est rejetée du fait d'une exception de procédure qui ne permet pas de connaitre du fond de l'affaire, car elle est défectueuse, pour incompétence judiciaire, pour forclusion ou pour désistement de l'acteur. Cet aspect est expressément exclu par certains systèmes dans lesquels l'action judiciaire provoque l'interruption du délai (article 877 du code civil costaricain : article 977 du code de commerce costaricain : article 944 du code de commerce cubain : article 2.243 du code civil français : article 1.506 du code civil guatémaltèque : article 2.015 du code civil haïtien : article 3:316.2 des codes civils néerlandais et surinamais : article 1.692 du code de commerce hondurien : article 1.649A du code de commerce panaméen : articles 2086 et 2087 du code civil saint-lucien : article 17 de la convention de la CNUDCI). L'option choisie par les présents Principes fait que, même lorsqu'une procédure n'est pas achevée par une décision rendue au fond, son engagement par l'une des parties démontre sa volonté d'exercer son droit, y compris dans les cas de désistement du demandeur ou de forclusion, dans lesquels le cours de la procédure a été interrompu. Ces comportements ne peuvent être considérés comme un acte de rejet de la prescription, à condition qu'il n'existe pas de volonté allant dans ce sens. La suspension se prolongera jusqu'à ce que la procédure touche à sa fin conformément au droit de la procédure du for.

Exemple 1 : La multinationale d'assurance A s'engage à fournir les services d'assistance médicale des employés que le consultant B a dans toute la région caribéenne pendant 10 ans à compter de la conclusion du contrat, le 1er septembre 2005. Le 10 juillet 2010, l'assureur décide de fermer ses cliniques au Guatemala et au Mexique du fait de leur faible rentabilité. Le consultant B ouvre une procédure judiciaire pour inexécution contractuelle le 1er janvier 2013, qui se termine par une déclaration judiciaire le 15 décembre 2013 par laquelle l'organe compétent s'abstient de se prononcer pour défaut de compétence. La période entre le 1er janvier et le 15 décembre n'entre pas dans le décompte du délai général ou volontaire de prescription.

D'autres types de causes, prévus dans le paragraphe deuxième de l'article 9.3, regroupent les événements suspensifs traditionnels envisagés dans la majorité des systèmes. Il s'agit de cas où le titulaire du droit est empêché d'agir pour exercer son droit, soit pour des raisons personnelles, soit pour des raisons extérieures ou qui lui sont étrangères. Cela englobe les cas des incapables majeurs et mineurs sans représentant légal, qui ne disposent pas de mécanismes juridiques pour exercer leurs droits : les demandes au bénéfice ou en détriment de la déshérence, pour lesquelles la suspension agit comme moyen de protection des intérêts des futurs successeurs : ou les cas de force majeure. Contrairement aux systèmes de droit anglo-saxon, les présents Principes ne considèrent pas comme étant des causes suspensives les comportements dolosifs de l'une des parties entrainant une dissimulation ou une tromperie et portant sur des aspects déterminants pour l'exercice du droit de l'autre partie : option pour le critère de la connaissance ou de la faculté de connaissance (article 9.2 des Principes OHADAC) pour déterminer le commencement du décompte du délai général.

Enfin, la reconnaissance de l'effet suspensif des négociations débutées entre les parties évite, d'une part, qu'elles puissent être utilisées à l'égard du titulaire du droit comme mécanisme pour retarder l'exécution de l'obligation et épuiser le délai de prescription. D'autre part, elle évite qu'elles puissent être cataloguées comme un cas d'interruption conformément au prochain article des présents Principes. De ce fait, elles empêchent de les assimiler aux effets que pourrait produire la reconnaissance de la dette, ce qui ne bénéficierait en rien à celui qui accepterait de traiter la demande de manière informelle avec son créancier.

L'effet de la suspension suppose que le délai de prescription ne débute pas, dans certains cas, ou qu'il soit paralysé temporairement pendant le temps que dure la cause de la suspension. Conformément aux dispositions des présents Principes, il suffit que la cause de la suspension ait lieu durant le délai de prescription pour que la suspension s'opère et que ledit délai soit paralysé. Des raisons de convenance, liées à la fluidité des échanges commerciaux, imposent de ne pas adopter le critère retenu par certains systèmes qui matérialisent le moment où le fait générateur de la suspension doit se produire. Cela est le cas dans certains systèmes qui exigent que cet événement ait lieu avant l'échéance du délai (article III-7:303 DCFR) ou que la suspension se prolonge un certain temps après la survenance du fait suspensif. Le motif sous-jacent dans les systèmes qui imposent cette limite (éviter une prolongation excessive du délai de prescription après la suspension) est régi par les Principes OHADAC par l'établissent du délai maximum prévu à l'article 9.2.

Quel que soit l'événement qui interviendrait dans l'écoulement du délai de prescription, la suspension affecte la période légale ou conventionnelle de la prescription. La certitude et la souplesse nécessaires aux échanges transfrontaliers exigent que le titulaire de l'action puisse se voir opposer l'expiration de la période maximale de prescription si cette période s'est écoulée avant qu'il ne l'ait exercée.

Exemple 2 : Les faits sont ceux de l'exemple 1. La multinationale d'assurance A et le consultant B entament des négociations, afin de fixer le montant de l'indemnisation en cas d'inexécution, qui se prolongent jusqu'au 20 juillet 2024. Une procédure judiciaire est ouverte le 1er août 2025 et l'assureur A pourra effectivement invoquer l'écoulement du délai maximum de prescription.

Commentaire

Article 9.4

Nouveau délai de prescription par reconnaissance

1. En cas de reconnaissance du droit du créancier par le débiteur un nouveau délai de prescription commencera le jour suivant cette reconnaissance.

2. La reconnaissance résulte notamment de l'exécution totale ou partielle de l'obligation en connaissance de cause, du paiement d'intérêts, de la constitution d'une sûreté, ou de l'opposition de la compensation.

3. La reconnaissance efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien.

4. Le délai maximum de prescription ne peut pas être renouvelé par la reconnaissance ni être prolongé par le commencement d'un nouveau délai général ou convenu.

1. Portée de l'interruption - reconduction du délai de prescription

L'article 9.4 reprend l'un des cas qui, dans les territoires de tradition romano-germanique, provoque ladite « interruption » de la prescription, connue dans les systèmes anglo-saxons sous le nom de « reconduction » (renewal). L'interruption ou la reconduction empêche la prescription de se produire, éliminant et rendant inutile le délai écoulé jusque-là et commençant le décompte d'un nouveau délai de prescription de durée identique à celui qui a été annulé.

Dans une grande partie des systèmes nationaux faisant partie de l'OHADAC, une marge importante est généralement octroyée pour interrompre la prescription. Cette situation est caractéristique des pays sous influence directe du droit français, dans les systèmes juridiques de langue espagnole et dans les pays de droit néerlandais. Les situations ou les événements la provoquant sont, principalement : l'exercice judiciaire du droit (article 2.539 du code civil colombien : article 876 du code civil costaricain : article 121 du code civil cubain : article 944 du code de commerce cubain : article 2.244 du code civil dominicain : article 2.241 du code civil français : article 1.506.1 du code civil guatémaltèque : article 2.012 du code civil haïtien : article 3:316 des codes civils néerlandais y surinamais : article 2.301 du code civil hondurien : article 1.041 du code de commerce mexicain : article 927 du code civil nicaraguayen : article 1.711 du code civil panaméen : article 1.873 portoricain : article 2.085 du code civil saint-lucien : article 1.969 du code civil vénézuélien), la reconnaissance par le débiteur du droit du créancier (article 2.539 du code civil colombien : article 876 costaricain : article 2.242 du code civil dominicain : article 2.240 du code civil français : article 1.506.2 guatémaltèque : article 2.016 du code civil haïtien : article 3:318 des codes civils néerlandais y surinamais : article 2.301 du code civil hondurien : article 1.041 du code de commerce mexicain : article 927 nicaraguayen : article 1.711 du code civil panaméen : article 1.873 portoricain : article 2.088 du code civil saint-lucien), l'action extrajudiciaire du créancier (article 977 du code de commerce costaricain : article 1.711 du code civil panaméen : article 1873 portoricain : article 1.973 du code civil vénézuélien) : la communication écrite par laquelle le créancier se réserve son droit à l'exécution (article 3:317 des codes civils néerlandais y surinamais) et le paiement d'intérêts ou d'amortissements par le débiteur, ainsi que l'exécution partielle de l'obligation par celui-ci (article 1.506.3 du code civil guatémaltèque).

Dans le domaine de la common law, le « renewal » ou « fresh accrual action » se limite pratiquement à la reconnaissance par le débiteur de l'obligation et au paiement voire à l'exécution partielle (section 29 du Limitation Act du Royaume-Uni : sections 29-31 du Limitation Act 1997 d'Antigua-et-Barbuda : section 10 du Limitation Act, Chapter 7:02 du Guyana : sections 38-40 du Limitation Act des Bahamas : section 30 du Limitation Act 1984 des Bermudes : section 37 du Limitation of Actions Act, Chapter 17 de Grenade : section 22 du Limitation Act, Chapter 2.12 de Montserrat : section 12 du Limitation of Certain Actions Act, Chapter 7:09 de Trinité-et-Tobago).

Dans la même ligne, plus proche du modèle anglo-saxon, figurent les textes internationaux d'harmonisation du droit des contrats. Ces textes ont pour nette tendance de préférer le mécanisme de suspension plutôt que celui de la reprise du délai de prescription, qui n'est utilisée que dans les cas de reconnaissance par le débiteur (article 20 de la convention de la CNUDCI : article 10.4 PU : article 14:401 PELC : article III-7:401 DCFR : article 184 CESL). Les articles 14:402 PELC et III-7:402 DCFR prévoient également le renewal of period pour les créances constatées judiciairement, pour chaque intention raisonnable d'exécution par le créancier (renewal by attempted execution).

2. Le commencement d'un nouveau délai de prescription dans les Principes OHADAC

La formulation de l'article 9.4 permet de faire converger le modèle prévu par le droit anglais et par les systèmes romano-germaniques dans le domaine des échanges commerciaux transfrontaliers, en renouvelant les causes permettant de reprendre le début d'un nouveau délai de prescription, ce qui n'est possible que si le débiteur reconnait le droit du créancier. Cet effet limité de l'interruption - reconduction du délai de prescription vise à atteindre un équilibre entre les exigences de souplesse qu'impose le fonctionnement du commerce dans la région et les principes de sécurité juridique. La prescription se fonde sur la nécessité d'assurer la sécurité de la situation du sujet passif de la demande face à un silence prolongé de la part du titulaire du droit, et il n'y a donc pas de raison de préserver une situation de confiance ayant pu créer un silence prolongé de la part du titulaire du droit s'il est obligé de manifester de manière expresse ou tacite qu'il connait et attend la demande.

La reconnaissance doit être sans équivoque. Il n'est pas considéré approprié d'imposer, comme cela se fait dans les systèmes de common law, des conditions de forme pour sa validité. Une déclaration ou le comportement du sujet obligé à qui la prescription est favorable, révélant sans équivoque sa conformité avec l'existence, la durée d'application et la titularité du droit en question, empêche celui qui en est l'auteur d'invoquer en sa faveur le laps de temps écoulé à compter du début du décompte de la prescription. À titre illustratif, le paragraphe deuxième de l'article 9.4 mentionne, comme comportements satisfaisants mettant en évidence et démontrant sans équivoque la conformité du débiteur avec l'existence et la titularité du droit, l'exécution ou le paiement partiel, le paiement d'intérêts, l'octroi d'une garantie ou une compensation, dans la ligne de l'article 184 CESL. Ces actes ne diminuent pas la liste de ceux pouvant valoir reconnaissance par le débiteur. Tous les actes qui révèlent la disposition du débiteur à exécuter devront avoir ce statut, p. ex., une demande de report du paiement. Dans tous les cas, et quelle que soit la forme, expresse ou tacite, écrite ou orale, utilisée par le débiteur pour manifester sa connaissance et son acceptation du droit du créancier, cette manifestation vaudra reconnaissance, et la preuve de sa réalisation appartiendra au titulaire du droit à qui le commencement d'un nouveau délai de prescription est favorable.

La reconnaissance affecte la période généralement prévue ou, le cas échéant, celle qui a été convenue entre les parties, en écho aux dispositions de l'article 9.2 des présents Principes, bien qu'elle ne pourra en aucun cas, même comme conséquence de plusieurs reconnaissance, dépasser le délai maximum de quinze ans.

Exemple : Le 1er avril 2008, l'entreprise A charge l'entreprise B de la construction d'une usine pour le 1er octobre 2008. La livraison est retardée de 6 mois. A réclame, par voie extrajudiciaire et à plusieurs occasions, une indemnisation pour le retard (2010, 2015, 2018 et 2021), la dette étant chaque fois reconnue par B. Le 2 octobre 2023, le délai de prescription est consommé, sans que la dernière reconnaissance effectuée par B ne puisse emporter un allongement du délai maximum de prescription.

Commentaire

Article 9.5

Effets de la prescription

1. La partie qui bénéfice d'une prescription acquise doit l'invoquer afin qu'elle produise son effet extinctif à l'encontre de la partie prétendant faire valoir son droit.

2. Les parties ne peuvent pas réclamer ce qui a déjà été exécuté en raison d'une obligation du fait que le délai de prescription a expiré au moment de l'exécution, même si cette circonstance n'était pas connue.

1. Effet défensif de la prescription dans les Principes OHADAC

L'article se concentre sur l'effet défensif ou inhibiteur de la prescription, qui permet à l'une des parties au contrat, en se basant sur le simple écoulement du temps, de repousser la demande, sans atteindre toutefois l'incidence que la prescription exerce sur les droits. Il s'agit là dudit effet « faible », qui envisage la prescription comme un moyen de défense contre les réclamations tardives et intempestives, sans affecter le droit. Cette conception est caractéristique de la perspective procédurale de cette institution dans le modèle anglo-saxon [Rodriguez v Parker (1967), 1 QB 116, (1966) 2 All ER 349], reprise au niveau international (articles 10.1 et 10.9 PU : articles 14:101 et 14:501 PECL : article III-7:501 DCFR : article 185 CESL). Cependant, il convient de noter que dans le domaine de l'OHADAC, certains systèmes de droit français octroient un effet extinctif « fort » à la prescription, considérant qu'une fois la période de prescription écoulée, le droit s'éteint (article 2.219 du code civil français)

Bien que les systèmes juridiques de la Caraïbe adoptent des conceptions différentes, comme cela a été indiqué dans le commentaire sous l'article 9.1 des présents Principes, les résultats ou les effets coïncident généralement sur trois aspects : la partie qui en bénéficie doit l'invoquer, le paiement volontaire d'une dette prescrite ne donne pas droit à la répétition de l'indu et il peut être renoncé à la prescription consommée.

2. La non appréciation d'office de la prescription

Quel que soit le fondement (présomption implicite d'abandon d'un droit ou protection de la sécurité et de la sûreté juridiques) ou l'effet de la prescription (extinction ou subsistance d'un droit, d'une action ou d'une demande), les systèmes caribéens s'accordent sur le fait que la prescription n'intervient pas automatiquement (ipso iure) et les tribunaux ne peuvent pas l'admettre d'office en rejetant la demande, même si le délai de prescription s'est écoulé sans interruption ou suspension.

La nécessité de l'invoquer, caractéristique de la perspective procédurale de l'institution dans les systèmes de droit anglo-saxon [Ronex Properties Ltd v John Lang Construction Ltd (1983), 1 QB 404], est expressément consacrée dans certains systèmes de l'OHADAC (article 2.513 du code civil colombien : article 973 du code de commerce costaricain : article 2.223 du code civil dominicain : article 2.247 du code civil français : article 1.991 du code civil haïtien : article 3:322.1 des codes civils néerlandais y surinamais : article 1.688 du code de commerce hondurien : article 876 du code civil nicaraguayen : article 1.956 du code civil vénézuélien), et dans les textes internationaux (article 24 de la convention de la CNUDCI : article 10.9 (2) PU).

3. Qualité pour invoquer la prescription

Uniquement lorsqu'elle est invoquée de manière opportune, la qualité pour agir en demande de prescription revient à la partie au contrat qui en a le bénéfice. Cependant, bien que cela ne soit pas clairement admis dans tous les systèmes caribéens, certains systèmes, afin d'éviter de porter préjudice aux parties subissant la passivité de celle qui sont en droit de l'invoquer directement ou d'y renoncer, reconnaisse expressément que certains tiers ont la qualité pour invoquer la prescription ou pour y faire exception. Concrètement, certains systèmes juridiques de langue espagnole et certains territoires de l'OHADAC de droit français ou directement sous influence du droit français prévoient l'intérêt à agir des créanciers du bénéficiaire de la prescription et de toute personne intéressée ou ayant un intérêt légitime (article 974 du code de commerce costaricain : article 2.225 du code civil dominicain : article 2.253 du code civil français : article 1.993 du code civil haïtien : article 1.689 du code de commerce hondurien : article 1.143 du code civil mexicain : article 877 du code civil nicaraguayen : article 1.837 du code civil portoricain : article 2.051 du code civil saint-lucien : article 1.958 du code civil vénézuélien). Les Principes OHADAC ne préjugent pas de la possibilité pour les tiers d'invoquer la prescription alors que la présente réglementation ne leur reconnait ni à titre optionnel ni matériel. Cette question sera régie par la loi nationale applicable conformément aux règles de droit international privé.

4. La répétition de l'indu ne peut pas être appliquée à la dette prescrite payée volontairement

Cet effet résulte du fait que la prescription, conformément aux présents Principes, n'éteint pas le droit et n'intervient que si celui qui en bénéficie l'invoque. Ainsi, si celui qui peut l'opposer paie ou exécute au lieu de l'invoquer, le paiement ne pourra pas être qualifié d'indu ou d'erreur (bien que le débiteur méconnaisse l'effet du passage du temps), et ce sera un juste retour des choses si celui qui disposait d'un intérêt personnel n'a pas souhaité l'utiliser pour se défendre. Il s'agira d'un paiement irrécouvrable, l'enrichissement sans cause ne se produisant pas dans ce cas [Mill v Fowkes (1839), 5 Bing NC 455].

Certains systèmes justifient cet effet en considérant qu'après l'exécution des délais de prescription, l'obligation devient imparfaite du point de vue juridique, du fait qu'il ne convient pas d'imposer son exécution par la contrainte. Mais le système juridique l'exclut de la restitution (soluti retentio) car il existe un devoir moral de paiement des dettes prescrites (article 1.527 du code civil colombien : article 1.372 du code civil hondurien). Sans aller jusqu'à cette justification, nombre de systèmes reconnaissent expressément l'irrépétibilité des sommes versées en exécution de la dette prescrite, même si elles ont été effectuées en ignorant la prescription (article 975 du code de commerce costaricain : article 113 du code civil cubain : article 2.249 du code civil français : article 1.690 du code de commerce hondurien : article 26 de la convention de la CNUDCI : article 10.11 PU : article 14:501-2 PECL : article III-7:501 (2) DCFR).

Exemple : L'entreprise A, fournisseur de matériaux et d'équipements prothétiques de l'entreprise B, afin de maintenir leurs liens commerciaux, verse à une indemnisation pour l'équipement prothétique défectueux 3 ans après que le produit a été livré et ses défauts découverts. Suite à la rupture des relations commerciales pour mésentente 2 mois plus tard, A ne pourra demander la restitution de l'indemnisation pour enrichissement sans cause ou paiement indu au motif qu'il l'avait versée après expiration du délai de prescription.

Commentaire

Article 9.6

Renonciation à la prescription

1. Seule une prescription acquise est susceptible de renonciation.

2. La renonciation anticipée à la prescription produit les effets de la reconnaissance prévue à l'article 9.4.

1. Renonciation à la prescription consumée

La configuration de la prescription comme institution permettant à la partie au contrat qui en a le bénéfice de l'utiliser comme moyen de défense en réponse à la demande ou à une action en procédure par le créancier admet que, concernant les droits et les intérêts disponibles, l'intéressé pourra renoncer à l'avantage économique la prescription lui procure. L'effet de cette renonciation nécessitera que la totalité de la période de prescription se soit écoulée, sans possibilité de l'interrompre. La renonciation emporte le commencement d'un nouveau délai, général ou volontaire, de prescription. Du point de vue procédural de la common law, la renonciation se traduit par l'absence simple d'opposition à l'action judiciaire engagée. L'abandon de ce mode de défense a pour effet de permettre que celui qui dépose une réclamation hors délai puisse obtenir gain de cause.

La validité de la renonciation, telle que prévue dans le présent article, n'impose aucune condition pour la validité de la renonciation, admettant la renonciation expresse ainsi que la renonciation tacite, comme la majorité des systèmes de la région caribéenne (article 851 du code civil costaricain : article 2.514 du code civil colombien : article 2.221 du code civil dominicain : article 2.251 du code civil français : article 1.504 du code civil guatémaltèque : article 1.989 du code civil haïtien : article 2.268 du code civil hondurien : article 1.687 du code de commerce hondurien : article 1.141 du code civil mexicain : article 874 du code civil nicaraguayen : article 1.835 du code civil portoricain : article 2.049 du code civil saint-lucien : article 1.957 du code civil vénézuélien). La renonciation expresse peut découler d'une déclaration de volonté unilatérale de la partie à qui la prescription bénéficie mais aussi d'un accord ou d'un contrat avec l'autre partie, à travers duquel elle renonce elle renonce à la prescription en échange d'une contrepartie. Parmi les actes contenant une renonciation tacite figurent le paiement de la dette prescrite, sa reconnaissance par le débiteur, l'offre de paiement au créancier, la demande d'un délai pour qu'il soit effectif, les négociations concernant le montant à payer ou la soumission de sa détermination à l'arbitrage d'un tiers [Lubovsky v Snelling (1944), KB 44 : Wright v John Bagnall & Sons Ltd (1900) 2 QB 240 : Rendall v Hill's Dry Docks & Engineering Company (1900) 2 QB 245].

Si chacune des parties représente plusieurs sujets au contrat, les effets de la renonciation formulée uniquement par plusieurs des sujets ou vis-à-vis de plusieurs d'entre eux portant sur l'aspect actif ou passif de cette relation (créance ou obligation) relèveront des règles spécifiques régies par l'obligation concrète (solidarité, conjointe) conformément aux dispositions des présents Principes. Éluder l'influence de la prescription sur la pluralité de sujets liés à chacune des parties au contrat engendre quant à son invocation, sa suspension, sa reconnaissance ou sa renonciation au délai de prescription rend le système plus clair (article 177 de l'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013).

2. Légitimation

Les présents Principes ne régissent que les effets de la renonciation entre les parties au contrat. Ils ne préjugent pas des tiers éventuellement atteints dans leur droit légitime de s'opposer à la renonciation de la prescription consommée (article 2.225 du code civil colombien : article 974 du code de commerce costaricain : article 2.253 du code civil français : article 1.993 du code civil haïtien : article 2.270 du code civil hondurien : article 1.689 du code de commerce hondurien : article 877 du code civil nicaraguayen : article 1.837 du code civil portoricain : article 2.090 du code civil saint-lucien, article 1.958 du code civil vénézuélien), qui seront éventuellement déterminés par le droit national applicable conformément aux règles de droit international privé.

3. Renonciation de la prescription future

Sous influence du code civil français (articles 2.250 à 2.253), la majorité des systèmes caribéens de tradition continentale ou romano-germanique rejettent expressément l'admissibilité et la validité de la renonciation anticipée convenue par les parties ou sur déclaration unilatérale de l'intéressé (article 2.514 du code civil colombien : article 850 du code civil costaricain : article 970 du code de commerce costaricain : article 2.220 du code civil dominicain : article 1.503 guatémaltèque : article 1.988 du code civil haïtien : article 2.268 du code civil hondurien : article 1.687 du code de commerce hondurien : article 3:322.2 et 3 des codes civils néerlandais y surinamais : article 1.141 du code civil mexicain, article 873 du code civil nicaraguayen : article 1.835 du code civil portoricain : article 2.048 du code civil saint-lucien, article 1.954 du code civil vénézuélien).

La non renonciabilité à la prescription future repose sur le fondement objectif de l'institution, hormis les actes juridiques visant à rendre imprescriptible l'exercice de droits que la loi déclare prescriptibles et posant ainsi des limites à l'autonomie de la volonté. Il s'agit d'empêcher le prolongement excessif des délais pouvant rendre imprescriptible une action prescriptible.

Dans les présents Principes, étant donné l'admissibilité limitée des actes visant à modifier le délai général de prescription (article 9.2), il est considéré inutile de disposer que toute renonciation anticipée sera nulle, mais il est plus raisonnable de mettre en avant le fait qu'il s'agit d'une reconnaissance (tacite) effectuée par le débiteur du droit du créancier, conformément à l'article 9.4.

Exemple : 2 ans après la livraison de marchandises défectueuses, l'acheteur et le vendeur conviennent que ce dernier renonce à faire valoir le délai de prescription dont dispose l'acheteur pour agir en indemnisation pour non-conformité que peut exercer l'acheteur. Cet accord permettra de commencer un nouveau délai général de prescription.

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Téléchargements

Principes OHADAC relatifs aux contrats du commerce international.pdf