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Mardi 16 Avril 2024

L'Association ACP Legal

  • L'Ohadac et ACP Legal

    La notoriété mondiale et le succès du programme OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires) ont amené de très nombreux juristes, des entreprises et certains Gouvernements des Etats de la Caraïbe à réfléchir à la mise en place d'un programme d'unification du droit des affaires dans la Caraïbe reprenant la philosophie du précédent de l'OHADA.

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  • L'OHADAC en bref

    Plaquette réalisée par l'Association ACP Legal.

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PRINCIPES OHADAC RELATIFS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL

Article 7.3.1

Droit à la résolution du contrat

1. Une partie peut résoudre le contrat en cas d'inexécution essentielle de la part de l'autre partie.

2. Une partie peut également résoudre le contrat en cas d'inexécution non essentielle de la part de l'autre partie, après l'expiration du délai supplémentaire accordé conformément à l'article 7.1.6 et si l'autre partie n'a toujours pas exécuté ou corrigé l'inexécution de l'obligation, à moins que les conséquences soient de faible importance.

1. La configuration de la résolution en cas d'inexécution selon un modèle objectif

Dans tous les systèmes juridiques, la résolution est la conséquence de l'obligation synallagmatique. Ainsi, dans les contrats bilatéraux ou réciproques, chaque partie est tenue d'exécuter sa prestation à condition de recevoir ce qui lui a été promis. Par conséquent, face à l'inexécution de l'autre partie, la partie lésée a droit de se libérer de sa propre obligation. Toutefois, la possibilité de résoudre le contrat en cas d'inexécution se heurte au principe cardinal du droit des contrats : pacta sunt servanda. Pour cette raison, et pour d'autres d'ordre pratique et économique, les différents systèmes juridiques posent plus ou moins d'obstacles et de conditions à l'action en résolution.

La différence entre les modèles subjectifs ou objectifs de l'inexécution dans les systèmes de la zone de la Caraïbe repose sur la recherche ou non du motif de l'inexécution.

Dans les systèmes fondés sur la faute, la résolution prend la forme d'une sanction (résolution-sanction de droit privé), et est conçue comme un reproche fait au comportement négligent et dolosif du débiteur défaillant, alors que les cas d'inexécution non fautive sont ramenés à la théorie des risques (p. ex. articles 1.068-1.072 du code civil panaméen : article 1.344 du code civil vénézuélien). Par contre, dans les systèmes anglo-saxons, le caractère fautif ou non de l'inexécution ne conditionne pas le droit ou non de résoudre le contrat (dans le même sens, article 6:265.1 des codes civils néerlandais et surinamais).

Dans le droit uniforme, la tendance objective prédomine. Dans les PU, le créancier insatisfait a le droit de résoudre le contrat indépendamment du caractère fautif ou non de l'inexécution (articles 7.3.1 et s.). De manière similaire, la CVIM reconnait à la partie lésée par l'inexécution le droit d'agir en résolution à condition que les conditions requises soient remplies (inexécution essentielle), indépendamment de son caractère fautif (articles 45 et 61).

Pour leur part, les PECL et le DCFR, alors qu'ils retiennent le concept unitaire et objectif de l'inexécution, traitent des cas d'inexécution dus à un empêchement total et permanent dont le débiteur ne peut être tenu pour responsable, et pour lesquels le contrat se trouve automatiquement résolu [articles 9.303 (4) PECL et III-3:104 (4) DCFR]. Dans la même ligne, figure l'article 126 de l'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013.

Cette dernière solution est celle que les Principes OHADAC ont préféré adopter en écho à d'autres droits en vigueur dans la région, et selon lesquels il sera « automatiquement mis fin » au contrat en cas d'impossibilité d'exécution pour cause de force majeure (article 7.1.8 des présents Principes). Le concept objectif de la résolution pour inexécution est retenu et il sera ipso iure dans ce cas (paragraphe quatre de l'article 7.1.8), et ne concernera les cas spécifiques d'une cause justificative que pour le régime de la résolution.

2. L'inexécution grave ou essentielle ou l'octroi d'un délai supplémentaire comme conditions de la résolution

La majorité des systèmes de tradition romaniste, sous l'influence de l'article 1.184 du code civil français, conçoivent la résolution pour inexécution comme une condition résolutoire implicite dans les contrats bilatéraux ou synallagmatiques, en cas de défaillance de l'une des parties (article 1.546 du code civil colombien : article 692 du code civil costaricain : article 1.184 du code civil dominicain : article 1.535 du code civil guatémaltèque : article 974 du code civil haïtien : articles 1.386 du code civil et 747 du code de commerce honduriens : article 1.949 du code civil mexicain : article 1.885 du code civil nicaraguayen : article 1.009 du code civil panaméen : article 1.077 du code civil portoricain : article 141 du code de commerce vénézuélien). Font exception à la règle, l'article 306 du code civil cubain qui considère la résolution comme étant l'une des causes d'extinction des obligations et l'article 1.167 du code civil vénézuélien, qui la considère comme l'un des effets du contrat, comme un effet particulier des contrats bilatéraux. Et la majorité des codes du commerce ne la régit pas, non plus, en tant que condition résolutoire implicite, mais comme un remède général (article 870 du code de commerce colombien) ou seulement pour des contrats spécifiques (p. ex. articles 973 et 1.325 du code de commerce colombien : article 463 du code de commerce costaricain : article 329 du code civil cubain : article 711 du code civil guatémaltèque : article 376 du code de commerce mexicain : article 759 du code de commerce panaméen : article 250 du code civil portoricain)

Du fait que la résolution ne figure pas comme le remède à proprement parler face à l'inexécution, les codes hérités des droits français et espagnol n'en délimitent pas les conditions en exigeant positivement, par exemple, une inexécution essentielle. Toutefois, cette condition a été posée par la doctrine et la jurisprudence fondée sur l'équité (arrêt de la Cour Suprême de Justice de Colombie du 18 décembre 2009, Exp. 41001-3103-004-1996-09616-01 : du 22 octobre 2003, Exp. 7451 : et du 11 septembre 1984, Gaceta Judicial, tome 176, n° 2415). L'avant-projet de réforme du droit français des obligations s de 2013 (article 132) établit également que la gravité de l'inexécution est une condition pour obtenir la résolution.

Traditionnellement, les systèmes anglais et étatsunien (et les systèmes sous leur influence) ont mis en place des filtres pour éviter le recours injustifié à la résolution. Dans leur approche classique, ces droits divisent les clauses contractuelles en conditions et warranties, et octroient seulement à la partie lésée par l'inexécution des premières le droit de résoudre le contrat (p. ex., suivant le régime de la section 53 du Sale of Goods Act anglais : section 53 du Sale of Goods Act des Bahamas, de Montserrat, d'Antigua-et-Barbuda et de Trinité-et-Tobago, utilisant une formulation identique : et sections 52 et 54 du Sale of Goods Act de la Jamaïque et du Bélize, respectivement).

Il est également permis à une partie au contrat de résoudre le contrat (même si ce n'est pas en présence d'une condition), en cas d'une renunciation ou repudiation du contrat par l'autre partie. Le débiteur « répudie » un contrat dès lors qu'il manifeste par son comportement ou verbalement son intention de ne pas exécuter son obligation ou s'il déclare expressément qu'il lui sera impossible d'exécuter les termes essentiels de sa prestation.

Toutefois, la classification rigoureuse des contractual terms s'assouplissent par la voie judiciaire et législative et donc, dans certains cas, les juges estiment que la clause est de type « intermédiaire » (intermediate ou innominate term), et autorise la résolution en se fondant sur le caractère sufficently serious de l'inexécution et sur la gravité des conséquences pour le créancier [Hong-Kong Fir Shipping Co Ltd v Kawasaki Kisen Kaisha Ltd (1962), 2 QB 26]. L'introduction d'une troisième catégorie de clauses contractuelles sert à mettre l'accent sur les conséquences de l'inexécution, bien qu'un tel transfert de critère est davantage formel que matériel. Donc d'un point de vue historique et pratique, par principe pour considérer que l'inexécution permet la résolution, il faut qu'elle soit grave, c'est-à-dire que ses conséquences affectent de manière sérieuse le résultat ou le bénéfice que le créancier espérait obtenir du contrat. Ce principe est connu sous le nom de substancial failure in performance pour les territoires dépendant des États-Unis [Article 2, Partie 7 : Remedies UCC : sections 241 et 242 du Restatement Second of Contracts].

Dans les codes civils néerlandais et surinamais, le filtre utilisé pour éviter des résolutions fantaisistes est la technique du Nachfrist. Ainsi, même si l'exécution est encore possible, le créancier ne peut pas déclarer le contrat résolu sans mettre préalablement le débiteur en demeure (article 6:265.2 des codes civils néerlandais et surinamais). Par conséquent, le créancier devra enjoindre le débiteur de s'exécuter en lui octroyant un délai supplémentaire. Et ce n'est qu'une fois que ce délai aura expiré sans que l'exécution ait été réalisée que la résolution pourra intervenir. La mise en demeure n'est pas exigée ni le délai supplémentaire si les parties ont convenu d'un terme essentiel (fatale termijn). De même, la résolution est possible sans délai si l'exécution de la prestation est temporairement ou définitivement impossible, sans qu'il ne soit important de savoir si cela est dû à une force majeure ou à une faute. Quant à la limite relative à l'inexécution, le présent article écarte la résolution dès lors que l'inexécution « au regard de sa nature ou de son importance mineure, ne justifie pas la résolution et les effets qu'elle entraine ».

Dans le même sens, le droit uniforme combine l'inexécution essentielle (fundamental breach) et la technique du Nachfrist. Ce régime de résolution figure aux articles 49 et 64 CVIM, 7.3.1 PU : 9:301 PECL, III-3:502 DCFR, et 114 et 134 CESL.

Les Principes OHADAC, suivant cette ligne d'inspiration, adoptent une solution qui, bien qu'elle ne soit pas retenue dans certains droits nationaux, ne leur est toutefois pas étrangère. La possibilité de résoudre le contrat est reconnue à la partie qui n'a pas obtenu satisfaction du fait de toute inexécution, y compris le retard et l'exécution défectueuse. En présence d'une inexécution essentielle prévue à l'article 7.1.2 ou dans une clause prévue par les parties au contrat, le créancier lésé pourra résoudre le contrat sans avoir besoin d'octroyer un délai supplémentaire au débiteur, qui n'a pas de sens dans cas. Mais si l'exécution continue d'être possible et utile (inexécution non essentielle, soit pour retard soit pour défaut de prestation), le créancier pourra octroyer un délai supplémentaire afin de lui donner une dernière chance pour exécuter son obligation. Le régime prévu à l'article 7.1.6 implique que le créancier ait le droit de résoudre le contrat à l'expiration du délai imparti, même s'il s'agit d'une inexécution non essentielle. Toutefois, une correction est introduite afin d'éviter que la partie contractante opportuniste n'utilise ce moyen de résolution pour se sortir d'une mauvaise affaire, en invoquant une inexécution de faible importance. Pour cette raison, il est prévu qu'il ne pourra pas agir en résolution dès lors que l'inexécution est de moindre importance, une exception, comme cela a été indiqué, qui est contenue également à l'article 6:265 des codes civils néerlandais et surinamais et dans la Directive 1999/44/CE (article 3.6).

Commentaire

Article 7.3.2

Inexécution anticipée et insuffisance de garanties

1. Une partie est fondée à résoudre le contrat si, avant l'échéance, il est manifeste qu'il y aura inexécution essentielle de la part de l'autre partie.

2. La partie qui croit raisonnablement qu'il y aura inexécution essentielle de la part de l'autre partie peut exiger d'elle des garanties suffisantes de bonne exécution dans un délai raisonnable et peut, dans l'intervalle, suspendre l'exécution de ses propres obligations. Elle peut résoudre le contrat si ces garanties ne sont pas fournies dans ledit délai raisonnable.

1. Résolution du contrat en cas d'inexécution anticipée

La règle proposée au paragraphe premier du présent article reprend ce qui est dénommé en droit anglo-saxon anticipatory breach of the contract, et qui permet à une partie de résoudre le contrat avant l'échéance, dans le cas d'inexécution essentielle prévisible de l'autre partie. L'institutionnalisation de ce concept s'avère utile non seulement pour le créancier, qui peut de la sorte utiliser ce moyen de défense face à l'inexécution, sans attendre que son intérêt contractuel soit insatisfait et ainsi se reporter sur un marché alternatif pour obtenir une prestation en remplacement, mais également au débiteur qui verra minimiser le dommage qu'il sera tenu de réparer pour inexécution.

Le droit de résolution, reconnu par le présent article face à une inexécution prévisible, est fondé sur l'idée qu'il n'est pas possible qu'une partie demande que l'autre partie continue d'être liée à elle par le contrat alors qu'il s'avère évident que cette partie ne peut pas exécuter son obligation ou qu'elle ne le fera pas à la date convenue. La reconnaissance de ce droit comme moyen de protection implique une égalité entre l'inexécution essentielle prévisible et l'inexécution essentielle d'une obligation déjà échue. Par conséquent, la partie qui résout le contrat face à l'inexécution prévisible de l'autre est fondée à utiliser tous les remèdes contenus dans les présents Principes en cas d'inexécution, y compris de réclamer des dommages et intérêts si, à l'échéance de l'obligation, il existe une cause justifiant l'inexécution ex article 7.1.8 des présents Principes.

Cette règle trouve son origine dans la common law [Hochster v de La Tour (1853), 2 E&B 678] : Universal Cargo Carriers Corp v Citati (1957), 2 QB 401 : Frost v Knight (1872), LR 7ex 111 : Federal Commerce & Navigation Ltd v Molma Alpha Inc (1979), AC 757 : et Woodar Investment Development Ltd v Wimpey Construction UK Ltd, (1980), WLR 277] et a été expressément reconnue dans la section 250 du Restatement Second of Contracts et dans la section 2-610 UCC. Parallèlement, dans les pays de l'OHADAC dépendant du droit anglo-américain, la jurisprudence reconnait expressément ce remède face à l'inexécution, permettant au créancier de résoudre le contrat dès lors que le débiteur manifeste clairement son intention de ne pas exécuter [arrêt de la High Court de Trinité-et-Tobago dans l'affaire Jemmott v Rodríguez (2009), No. 2888 de 2006 (Carilaw TT 2009 HC 49)].

Dans les systèmes juridiques romanistes, il n'existe pas de disposition qui, à titre général, permette de résoudre le contrat face à une inexécution prévisible du débiteur. Toutefois, cette règle n'est pas totalement méconnue dans ces systèmes car ils permettent d'exercer l'action résolutoire face à une situation d'inexécution prévisible en matière de vente (article 1.530 du code civil vénézuélien). D'autre part, il existe une ligne jurisprudentielle favorable à la résolution du contrat pour inexécution intentionnelle du débiteur qui permettrait de reconnaitre ce moyen de défense face à l'inexécution prévue par les articles 1.546 du code civil colombien, 306 du code civil cubain, 1.184 des codes civils dominicain et français, 1.432 du code civil guatémaltèque, 1.386 du code civil hondurien, 1.949 du code civil mexicain, 1.009 du code civil panaméen, 1.077 du code civil portoricain ou 1.167 du code civil vénézuélien.

Les dispositions de l'article 6:80 du code civil néerlandais et surinamais et l'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013 (article 128) sont davantage explicites sur ce point. Les articles 116 et 136 CESL visent le risque d'inexécution anticipée de la part de l'acheteur ou du vendeur, respectivement comme cause permettant à l'autre partie de résoudre le contrat si cette inexécution est essentielle.

De même, la règle de l'inexécution anticipée est expressément contenue dans les textes internationaux de droit uniforme en matière contractuelle (article 72.1 CVIM : article 7.3.3. PU : article 9:304 PECL : article 3:504 DCFR) qui, comme dans les présents Principes, exige la réunion de deux conditions pour permettre au créancier de résoudre le contrat avant la date d'échéance de l'obligation.

En premier lieu, il est nécessaire que l'inexécution future soit évidente [Chilean Nitrate Sale Corp v Marine Transport Co Ltd (The Hermosa) (1982), All ER 234], c'est-à-dire qu'une simple suspicion n'est pas suffisante même si elle est bien fondée. Par conséquent, il doit y avoir de la part du débiteur un manque de capacité ou de volonté évident à exécuter, qui pourrait être expressément notifié par le débiteur ou mis en évidence par son comportement. Dans d'autres cas, dès lors que le comportement du débiteur fait seulement naitre des doutes quant à sa volonté ou à sa capacité d'exécuter la prestation, il faudra s'en tenir au cas prévu au paragraphe deux du présent article, qui permet à la partie lésée de demander une garantie d'exécution dans un délai raisonnable. La disposition sera également applicable dès lors qu'un risque de retard d'exécution pèse : si une partie indique qu'elle exécutera, mais avec du retard, l'autre partie lésée pourra résoudre le contrat si la date d'exécution constitue un terme essentiel du contrat.

En second lieu, il est important que l'inexécution qui est prévue soit essentielle [Afovos Shipping Co SA v Pagnan and Lli (The Afovos) (1983), 1 WLR 195], dans le sens de l'article 7.1.2 des Principes OHADAC, de sorte qu'elle cause au créancier un préjudice certain qui le prive de toute attente relative au contrat, sauf s'il avait prévu ou aurait pu prévoir en bonne logique ce résultat.

Exemple : Une entreprise familiale spécialisée dans le dessin, la fabrication et la commercialisation de produits de bijouterie, signe un contrat avec un acheteur par lequel elle s'engage à livre 100 pièces uniques spécialement dessinées pour un évènement qui aura lieu le 5 janvier. Le 2 janvier, l'entreprise familiale informe son client de l'impossibilité de livrer à temps les bijoux, ce qui permet au client de résoudre le contrat.

2. Résolution du contrat pour suffisance de garantie d'exécution

Tout comme le paragraphe premier exige une inexécution essentielle manifeste, dans le second paragraphe des présents Principes il suffit que le créancier croie raisonnablement ou à juste titre qu'il y aura une inexécution essentielle. D'où le fait que les mesures prévues sont différentes, puisque dans le second cas le cocontractant ne pourra pas directement résoudre le contrat.

En vue de protéger son intérêt, le présent article propose comme solution de permettre à la partie cocontractant, qui craint l'inexécution essentielle de l'autre, de suspendre sa propre exécution (si elle n'a pas encore exécuté la sienne), alors même qu'elle demande au débiteur de lui fournir les garanties suffisantes qu'il va exécuter ses obligations dans un délai raisonnable.

Si le créancier ne reçoit pas cette garantie et qu'il a des raisons de croire que l'autre partie n'exécutera pas, il pourra résoudre le contrat conformément à ce qui est prévu à l'article 7.3.3 des présents Principes, puisque le fait de ne pas fournir de garantie vaut inexécution anticipée de l'obligation et ouvre droit à la résolution.

Exemple 1 : A dans le pays X, qui est un architecte de renom et propriétaire d'une entreprise de construction, s'engage à réaliser le projet et la construction de nouveaux bâtiments qui accueilleront les bureaux de l'entreprise commerciale B, du pays Y. La livraison est une condition essentielle qui figure au contrat à une date déterminée. Peu de temps après la signature du contrat, B apprend que A a accepté un autre projet de grande envergure. Par conséquent, craignant que sa construction ne soit pas terminée dans les délais prévus, B demande à A qu'il lui confirme dans un délai de dix jours s'il exécutera son obligation dans les temps. Si A ne le fait pas, B sera en droit de résoudre le contrat.

La règle générale relative à la « adequated assurance of performance » a été développée par le droit étatsunien et figure à la section 2-609 UCC, mais ne figure dans aucun autre ordre juridique de la zone. Toutefois, certains systèmes, même s'ils n'ouvrent pas la possibilité de résoudre le contrat, prévoient dans le cadre des contrats de vente la possibilité pour le vendeur de s'abstenir d'exécuter, s'il a un doute sur l'exécution de l'autre partie et ce, principalement face au risque d'insolvabilité. C'est le cas des articles 1.073 du code civil costaricain, 1.613 des codes civils dominicain et français, 1.624 du code civil hondurien, 2.287 du code civil mexicain, 2.594 du code civil nicaraguayen, 1.237 du code civil panaméen, 1.356 du code civil portoricain, 1.407 du code civil saint-lucien et 1.493 du code civil vénézuélien. Toutefois, le droit anglais ne dispose pas de règle équivalente. Il reprend expressément la règle de l'article 6:80 (1) (c) des codes civils néerlandais et surinamais, qui se trouve aussi dans les textes d'harmonisation du droit (article 7.3.4 PU : article 8:105 PECL : article III-3: 505 DCFR).

La teneur des garanties raisonnables dépendra de chaque contrat et des circonstances de chaque espèce. La règle ne doit pas être interprétée dans le sens qu'il s'agit d'exiger du débiteur la prestation de garantie à proprement parler d'un point de vue juridique (réelle ou personnelle), mais que, parfois, un simple engagement d'exécution de la part du débiteur ou tout autre comportement susceptible de rassurer le créancier sur l'exécution, sera parfois suffisant.

Exemple 2 : En reprenant l'hypothèse du contrat de construction de l'exemple 1, il suffira que B s'engage à exécuter son obligation et qu'il prouve à A qu'il a embauché des salariés supplémentaires afin de mener à bien les deux projets.

Commentaire

Article 7.3.3

Exercice de la résolution

1. Sauf stipulation contraire, la résolution du contrat s'opère par notification au débiteur.

2. Lorsque le créancier a accordé un délai supplémentaire d'exécution indiquant, conformément au paragraphe 3 de l'article 7.1.6, que le contrat sera considéré comme étant automatiquement résolu si le débiteur n'exécute pas l'obligation dans le délai imparti, une nouvelle notification n'est pas nécessaire et le contrat sera résolu à l'échéance du délai supplémentaire ou du délai raisonnable imparti.

3. Lorsque l'offre d'exécution est tardive ou que l'exécution n'est pas conforme, le créancier perd le droit de résoudre le contrat s'il ne fait pas parvenir à l'autre partie une notification dans ce sens dans un délai raisonnable à partir du moment où il a eu, ou aurait dû avoir, connaissance de l'offre ou de la non-conformité ou à partir de la fin d'un délai supplémentaire d'exécution, le cas échéant.

Le présent article adopte un système de résolution extrajudiciaire par simple notification à la partie défaillante adressée par la partie lésée. Il s'agit d'une modèle convergent en droit comparé et qui figure, avec quelques différences, dans les droits de tradition néerlandaise et anglo-américaine.

Toutefois, les systèmes juridiques de tradition romaniste prévoient, comme principe, un modèle de résolution judiciaire, hérité de l'article 1.184 du code civil français et, sous l'influence de cet article, de l'article 1.124 du code civil espagnol. Après avoir constaté l'inexécution, le créancier ne peut pas déclarer unilatéralement la résolution du contrat, mais il doit demander judiciairement la résolution. La décision relative à la résolution demeure en définitive entre les mains du juge, qui contrôle a priori l'opportunité de recourir à cette solution. Le système relève de la conception de la résolution comme sanction, dont l'application doit être contrôlée par le juge (article 1.546 du code civil colombien : article 692 du code civil costaricain : article 1.184 des codes civils dominicain et français : article 1.582 du code civil guatémaltèque : article 974 du code civil haïtien : article 1.386 du code civil hondurien : article 1.949 du code civil mexicain : article 1.885 du code civil nicaraguayen : article 1.009 du code civil panaméen : article 1.077 du code civil portoricain : article 1.167 du code civil vénézuélien).

Malgré cela, le modèle reconnait des exceptions à la résolution judiciaire. Traditionnellement les codes la prévoient en matière de vente de biens meubles, pour laquelle la résolution ipso iure ou automatique intervient dès lors que l'acheteur ne s'est pas présenté pour récupérer la chose dans le délai prévu (article 1.085 du code civil costaricain : article 1.657 des codes civils français et dominicain : article 1.442 du code civil haïtien : article 1.664 du code civil hondurien : article 1.2752 du code civil panaméen : article 1.394 du code civil portoricain : article 1.531 du code civil vénézuélien). Il est fait également exception à la résolution judiciaire, cette fois dans le domaine conventionnel et non légal, si une clause résolutoire a été expressément prévue dans le contrat de vente de biens immeubles (article 1.656 des codes civils français et dominicain : article 1.441 du code civil haïtien : articles 1.663 du code civil hondurien : article 1.275.1 du code civil panaméen : article 1.393 du code civil portoricain).

En outre, dans la majorité de ces systèmes, la résolution judiciaire a été relayée par la jurisprudence, en vue de faciliter les relations juridiques et économiques. En un mot, la nécessité de saisir le juge pour résoudre le contrat face à une inexécution n'est pas ressentie dans ces droits comme un principe logique indiscutable et auquel il est impossible de renoncer. L'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013 va dans cette ligne de la suppression de cette exigence.

Le droit néerlandais présente la caractéristique particulière de réunir les deux modèles en permettant créancier lésé de choisir entre les deux (article 6:267.1 des codes civils néerlandais et surinamais).

Le droit anglo-américain suit un modèle de résolution extrajudiciaire caractérisé par ses faibles exigences formelles. La résolution du contrat pour inexécution ne se produit pas automatiquement, mais le créancier à la faculté de choisir entre la résolution ou le maintien du contrat. C'est la prérogative reconnue au créancier insatisfait de choisir entre une solution ou une autre, au regard des conséquences économiques de chacune, sans que l'automatisme de la mesure ne puisse lui imposer une résolution qui s'avérerait inappropriée. Le problème réside dans la détermination des modalités d'exercice du choix du débiteur. Sur ce point, une grande liberté formelle est reconnue par ces systèmes et permet au créancier de résoudre le contrat sans avoir besoin de le notifier. Il suffit que, par son comportement non équivoque, il s'avère manifeste qu'il a décidé de mettre fin au contrat [Sookraj v Samaroo (2004), UKPC 50]. Normalement, le silence ou la simple inaction ne seront pas suffisants pour cela, même si la règle n'est pas absolue, vue que parfois le silence manifeste de façon claire qu'il est mis fin au contrat [Vitol SA v Norelf Ltd (1996), AC 800].

Dans la majorité des cas, la résolution sera exercée par notification adressée par le créancier au débiteur, exigée parfois par la loi. Mais la notification ne s'avère pas nécessaire si le créancier, pour réduire le montant des dommages et intérêts, a conclu un contrat de substitution pour pallier l'inexécution, car dans ce cas il sera considéré qu'il a opté pour la résolution [Guston v Richmond-upon-Thames LBC (1981) : section 2.706 UCC : section 48.3 du Sale of Goods Act anglais et des Bahamas, de Montserrat, d'Antigua-et-Barbuda et de Trinité-et-Tobago : sections 47.3 et 49.3 du Sale of Goods Act de la Jamaïque et du Bélize, respectivement].

En droit uniforme, le droit de résoudre le contrat s'exerce de façon extrajudiciaire par la notification unilatérale du créancier lésé. Tel en disposent les articles 26 CVIM et 118 et 138 CESL.

La notification est prévue aussi par les articles 7.3.2. (1) PU, 9:303 (1) PECL et III-3:507 (1) DCFR. Ces dispositions délimitent aussi le droit à la résolution [article 7.3.2. (2) PU : article 9:303 (2) PECL : article III-3:508 (1) DCFR].

Finalement, concernant la forme que la déclaration de volonté du créancier devra prendre pour la résolution, à titre général la majorité des systèmes préfère la liberté de forme, mais pas de façon aussi radicale que le système de common law. Dans la ligne de ce principe, la CVIM (article 26) mentionne uniquement la notice, à l'instar des PU [article 7.3.2 (1)], des PECL [article 9.303 (1)], du DCFR [article III-3.507 (1)] et de la CESL (articles 118 et 138). Les deux textes des Principes et celui du DCFR, par le concept de « notification », expliquent qu'elle peut être réalisée par tout moyen approprié aux circonstances [articles 1.9 PU : 1.303 (1) PECL : article I-1.109 (2) DCFR]. La tendance à accorder une liberté formelle fait exception dans certains systèmes. Tel est le cas des systèmes juridiques néerlandais et surinamais, qui exigent que la notification se fasse par écrit (article 6:267 des codes civils néerlandais et surinamais), sans toutefois requérir une forme particulière à cet écrit puisque un acte sous-seing privé est considéré comme suffisant (article 3:37.1 des codes civils néerlandais et surinamais).

Faisant écho à ces textes, les Principes OHADAC prévoient que le droit de résolution s'exerce, sauf disposition contraire des parties, par une notification unilatérale de la partie lésée adressée à l'autre partie, et optent pour une forme de notification simple, respectant la liberté formelle, même si dans la pratique il est préférable d'opter pour un écrit afin de se préserver un moyen de preuve.

La résolution implique, donc, que le créancier se prévale de la faculté ou du droit qui lui est reconnu. Cela présente des avantages évidents du point de vue pratique puisque, outre la souplesse, l'efficacité et le coût modique que présente cette solution, cela permet également d'éliminer toute incertitude sur le sort du contrat comme cela est le cas durant la procédure de résolution judiciaire, et de fluidifier les relations juridiques. Cela signifie que les parties pourront recourir à cette solution à leur gré et sans contrôle. Au contraire, l'exigence d'une inexécution essentielle ou grave ou l'octroi d'un délai supplémentaire d'exécution, comme condition du droit à la résolution du contrat, sont soumis à la réponse de la partie lésée et, en cas de désaccord, les voies de résolution du litige demeurent ouvertes.

Dans les cas de résolution à l'issu du délai supplémentaire d'exécution, normalement la partie lésée adressera deux notifications à l'autre partie : la première pour lui fixer le nouveau délai imparti et l'autre pour lui notifier la résolution. Toutefois, conformément aux dispositions de l'article 7.1.6 (3) des présents Principes, il est possible pour le créancier dans une seul et unique notification d'octroyer un nouveau délai au débiteur et de lui notifier qu'à défaut d'exécution à l'issu de ce délai, le contrat sera automatiquement résolu. Cette possibilité est également prévue expressément dans les articles 7.1.5 (3) PU, 8:106 (3) PECL, III-3:507 DCFR et 115.3 et 135.3 CESL. Ils imposent au créancier de procéder à une nouvelle notification, ce qui n'est pas le cas du paragraphe deux de présent article.

Enfin, le paragraphe trois limite le droit de résoudre le contrat en se fondant sur le retard d'exécution, tel que cela a déjà été mentionné dans l'article 7.2.2 (4). En cas d'exécution tardive ou d'exécution non conforme, le silence du créancier peut laisser croire au débiteur qu'il accepte la prestation et qu'il ne va pas exercer son droit à la résolution. Pour cette raison, la partie lésée devra notifier sa décision de résoudre le contrat dans un délai raisonnable. Quand le créancier a octroyé au débiteur un délai supplémentaire pour exécuter, le délai raisonnable pour lui notifier la résolution commencera à courir à compter de l'échéance du délai supplémentaire. Dans les autres cas, le délai sera calculé à compter du moment où il a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance de la proposition d'exécution hors délai ou le défaut de conformité de la prestation.

Le sens à donner au « délai raisonnable » dépendra de la nature de chaque contrat, du délai initialement prévu pour l'exécution et des circonstances de l'inexécution. Ainsi, dans le cas de biens périssables, le délai sera plus court, de même que dans les cas où une solution de remplacement s'avèrera plus facile à obtenir, permettant d'éviter des abus sur la variation des prix.

Commentaire

Article 7.3.4

Effets de la résolution

1. La résolution du contrat libère pour l'avenir les parties de leurs obligations respectives.

2. Elle n'a pas d'effet sur les clauses du contrat relatives au règlement des différends ni sur toute autre clause destinée à produire effet même en cas de résolution.

3. Chaque partie peut demander la restitution de ce qu'elle a fourni, pourvu qu'elle procède simultanément à la restitution de ce qu'elle a reçu. Si la restitution matérielle s'avère impossible ou non raisonnable, elle doit être effectuée en valeur. Néanmoins, la partie qui a résolu le contrat n'est pas tenue à la restitution de la valeur si elle prouve que la perte ou la destruction de l'objet a pour cause la force majeure.

4. La partie tenue à la restitution doit remettre les profits perçus de la chose et a le droit à une indemnité pour les dépenses nécessaires ou de conservation faites.

1. L'effet libératoire de la résolution du contrat

Les conséquences caractéristiques de la résolution sont au nombre de deux : d'une part elle libère les parties de leurs obligations non encore exécutées (effet libératoire) et d'autre part elle permet de récupérer les prestations déjà exécutées (effet restitutoire).

Dans les systèmes caribéens de tradition romaniste, l'articulation de la résolution pour inexécution comme condition résolutoire implicitement contenue dans les contrats synallagmatiques (commentaire sous l'article 7.1.1) implique l'application des effets qui lui sont propres : remettre les choses dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat. Cet effet ex tunc est proche de celui qui intervient dans les cas de nullité du contrat. Toutefois, cette théorie de la résolution-annulation du contrat est une source de problèmes dans la pratique. C'est la raison pour laquelle la jurisprudence pose d'importantes exceptions à la règle de l'effet rétroactif, telles que celles qui portent sur les clauses contractuelles de résolution extrajudiciaire des différends et sur les contrats à exécution successive ou à exécution périodique.

Au contraire, dans les systèmes anglais et américain et dans les droits qui sont sous leur influence, la résolution ne produit d'effets qu'à partir du moment où elle est exercée par le créancier, et ne concerne pas les obligations ayant déjà été exécutées, ni celle exigibles avant la résolution. De ce fait, l'effet libératoire n'intervient que pour l'avenir : les parties se libèrent des obligations non encore échues au moment de la résolution, mais continuent d'être tenues d'exécuter les obligations déjà échues. Les systèmes issus du droit néerlandais retiennent la même idée puisque la résolution est dépourvue d'effets rétroactifs [articles 6:269 et 6:271 des codes civils néerlandais et surinamais].

Sur les points communs de toutes les traditions, le paragraphe premier de l'article proposé reprend l'effet libératoire de la résolution. La résolution produit seulement des effets à partir du moment où elle est exercée par la partie lésée, et libère les parties de leurs obligations futures mais sans affecter les obligations déjà exécutées ni celles à échoir et qui sont exigibles avant la fin du contrat.

Exemple : A et B concluent un contrat de construction par lequel A est le donneur d'ordre et B le preneur d'ordre. Si le donneur d'ordre décide de résoudre le contrat pour inexécution du fait du preneur d'ordre, B pourra réclamer la part du prix correspondant à la construction réalisée correctement avant la résolution du contrat et devra livrer à A la partie de la construction réalisée.

Les textes internationaux de droit uniforme suivent cette même ligne en consacrant également l'effet libératoire [article 81.1 CVIM : article 7.3.5 (1) PU : article 9:305 (1) PECL : article III-3:509 (1) DCFR].

2. Les clauses contractuelles non affectées par la résolution

La subsistance du contrat se matérialise par l'applicabilité après la résolution des clauses non directement concernées par l'objet des prestations : les clauses de règlement des dommages et intérêts (liquidated damages) et autres clauses pénales : les clauses de règlement extrajudiciaires des différends découlant du contrat : les clauses relatives au choix de la loi applicable : les clauses de confidentialité ou celles de non concurrence, etc., dont la survivance relève du paragraphe second.

Cette règle est commune à tous les systèmes. Ainsi pour ceux d'origine anglo-américaine, les ancillary obligations (obligations accessoires) ne sont pas affectées par la voie de résolution [Heyman v. Darwins (1942), AC 356, HL]. Dans les codes néerlandais ou surinamais il n'existe pas une règle qui retient expressément cette solution mais elle découle des articles 6:269 et 6:271. Dans la tradition romaniste, l'applicabilité de ces clauses après la résolution du contrat est l'une des exceptions reconnues par la jurisprudence à l'efficacité rétroactive. L'article 138 de l'avant-projet de réforme du droit français des obligations 2013 dispose dans ce sens.

Exemple : Une entreprise de dessin et de fabrication automobiles de luxe insère dans ces contrats de prestation de services qu'elle conclut avec les ingénieurs la clause suivante : « Les deux parties reconnaissent que l'information et la documentation reçue sous toute forme (digitale ou analogique, etc.) par l'autre partie, ou à laquelle elles auront accès pour les besoins du service prêté dans le cadre du contrat, est de caractère hautement confidentiel et ne devra pas être divulguée, ni utilisée pour un objectif différent que celui prévu au contrat ». Après la résolution du contrat par l'entreprise pour inexécution d'une livraison de projets à la date convenue, cette clause continue de s'appliquer pendant une durée raisonnable et la résolution ne dispense pas la partie contractante de son obligation de confidentialité.

De même, la règle figure dans les textes internationaux de droit uniforme : articles 81.1 CVIM, 7.3.5 (3) PU, 9:305 (2) PECL et III.- 3:509 (2) DCFR.

3. L'effet restitutoire de la résolution du contrat

Le troisième paragraphe de la règle proposée régit l'effet restitutoire de la résolution, en se fondant sur la rétroactivité limitée, en vue uniquement de régler la situation existant entre les parties du fait de l'inexécution. Il a été opté pour le modèle moderne de l'effet de la résolution, adopté par les codes civils néerlandais et surinamais, et par certains textes de droit uniforme.

En effet, alors que le droit anglo-américain représente l'absence d'effet rétroactif (malgré quelques exceptions), les systèmes romanistes préconisent comme règle générale la restitution avec effets réels, comme conséquence de la rétroactivité de la résolution. Dans le modèle proposé, le problème est observé avec plus d'empirisme et il est préféré d'établir des règles simples qui permettent de régler la situation économique des parties qui découle de la résolution.

Il s'agit d'un choix qui, cependant, ne s'avère pas si absolument étranger des traditions en présence dans la zone caribéenne. S'il est certain que le point de départ théorique des systèmes est celui indiqué dans le paragraphe précédent, il n'en demeure pas moins que le développement jurisprudentiel et législatif a nuancé les positions rigides initiales relatives à la non-rétroactivité ou à la rétroactivité de la résolution.

Ainsi, en droit anglo-américain, bien que la règle générale ne prenne pas en compte l'effet restitutoire, dans certaines circonstances il est reconnu à la partie qui a exécuté totalement ou partiellement sa prestation de la récupérer (restitutory remedy).

Dans les contrats de vente, la résolution par le vendeur pour inexécution de l'acheteur a normalement pour seul effet d'obliger personnellement celui-ci à la restitution, sans que la récupération de la propriété des biens vendus ne puisse se faire au détriment des tiers ou des créanciers de l'acheteur [articles 38-48 du Sale of Goods Act anglais : sections 39-48 du Sale of Goods Act des Bahamas, de Montserrat, d'Antigua-et-Barbuda et de Trinité-et-Tobago : sections 40-49 du Sale of Goods Act du Bélize : sections 40-47 du Sale of Goods Act de la Jamaïque : sections 2-703 (2) et 2-706 UCC : alors que la section 2-702 (2) UCC établit une exception limitée à cette règle]. Toutefois, le rejet justifié des biens par l'acheteur (résolution) emporte bien récupération de la propriété des biens pour l'acheteur, tant en droit anglais [Kwei Tek Chao v British Traders Ltd (1954), 2 QB 459], que dans l'UCC [section 2-401 (4) : article 2-602 (2)].

Pour ce qui concerne la récupération de sommes d'argent versées, les droits anglais et étasunien présentent une divergence. Le droit anglais restreint beaucoup le champ d'application de l'exception au principe général de la non-rétroactivité, de sorte que le créancier lésé peut prétendre à la restitution des sommes versées seulement s'il y a eu rupture du contrat [section 1 du Law Reform (Frustrated contracts) Act : article 20 du Contract Act du Bélize : section 3 du Law Reform (Frustated contracts) Act de la Jamaïque : section 6 du Law Reform (Misrepresentation and Frustated Contract) des Bermudas] ou dans les cas de termination for breach, si aucune contrepartie n'a été reçue (total failure of consideration). Donc, s'il y a eu un début d'exécution, aussi minime soit-il, il est considéré qu'il y a partial failure of consideration, que l'action restitutoire n'est pas possible et que seule l'action personnelle de damages est envisageable. Toutefois, souvent il est difficile de distinguer entre l'exécution partielle et celle qui diffère substantiellement de ce qui a été convenu, et cela apporte une souplesse à l'application de la règle anglaise. Aux États-Unis, cette règle ne s'applique pas : la failure of consideration n'est pas nécessaire et il suffit que l'inexécution soit suffisamment sérieuse pour que cela justifie la résolution du contrat, afin que la partie soit fondée à récupérer les somme versée par anticipation, sauf dans les cas de résolution partielle.

D'une part, la résolution ex tunc et avec des effets réels, préconisée par les systèmes nationaux de tradition romano-germanique, a été nuancée par la jurisprudence, face aux difficultés pratiques que présente la totale rétroactivité. Pour les éviter, il a été prévu un large champ de voies de restitution par équivalent et, même, des exceptions ont été créées à la règle générale sur la base de la divisibilité ou de l'indivisibilité des obligations contractuelles (dans les contrats à exécution successive). D'autre part, l'effet réel de la restitution est abandonné en présence d'un tiers qui doit être protégé. Cette évolution figure dans l'article 137.3 et 4 de l'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013.

Le modèle ici proposé vise à ce que la personne qui a exécuté une prestation sans ne rien recevoir en retour, doive pouvoir la récupérer soit, soit par équivalent. Le but poursuivit est de régler la situation existant après la résolution. Ce système est celui suivi fondamentalement par les propositions de droit uniforme [article 81.2 CVIM : article 7.3.6 (1) PU : articles 9:307-309 PECL : articles III-3:511 et s. DCFR].

Dans la règle que les présents Principes proposent, la résolution marque le commencement de l'obligation légale de restitution des prestations perçues par les parties. Par conséquent, la partie qui aurait payé par anticipation une somme d'argent et qui n'aurait pas reçu l'exécution conforme en retour, pourra récupérer cette somme. S'il ne s'agit pas d'argent, le contractant qui aurait remis un bien à l'autre partie, sans recevoir de contreprestation, pourra le récupérer. Toutefois, dans cette dernière hypothèse, si la récupération du bien remis s'avère impossible in natura (par exemple, parce qu'elle a été perdue ou est passée entre les mains d'un tiers), la restitution se fera en argent.

Il faut souligner qu'il ne s'agit pas d'un versement de dommages et intérêts, bien que dans la pratique, à de nombreuses reprises, la somme de l'indemnisation peut constituer l'un des postes correspondant à la prestation perçue et qui n'a pas été rendue. Toutefois, il existe d'autres cas où il ne peut pas être procédé au versement de dommages et intérêts parce que l'inexécution est justifiée (article 7.1.8), et que la partie devra, quand même, restituer ce qu'elle a reçu afin d'éviter tout enrichissement sans cause.

La restitution par équivalent intervient également quand, même si la restitution in natura ne s'avère pas impossible, il n'est pas raisonnable de créer une difficulté trop importante ou un coût économique disproportionné.

Exemple 1 : Le sculpteur A a été engagé par B pour réaliser une sculpture de bas-reliefs sur la façade principale de sa maison. À la fin des travaux, B ne paie pas le prix convenu, et A décide de résoudre le contrat. Bien qu'il ne soit pas physiquement impossible de desceller les bas-reliefs de la façade, le coût en serait disproportionné. Par conséquent, B devra restituer à A le montant des travaux.

Pour évaluer l'équivalent, sauf disposition contraire convenue entre les parties, le montant de la prestation au moment prévu de l'exécution servira de référence.

La partie lésée par l'inexécution ne sera pas tenue de restituer le montant de la prestation qui lui a été remis par le débiteur défaillant, s'il prouve que la perte ou la destruction du bien s'est produit pour cause de force majeure (article 7.1.8 des présents Principes).

Exemple 2 : L'entreprise A du pays X, fabricant de boissons et à base de fruits tropicaux, conclut avec l'entreprise fructicole B du pays Y, un contrat de vente par lequel B s'oblige à livrer cinq tonnes de bananes. B a trouvé un meilleur acheteur pour ses bananes et livre à A cinq tonnes de mangues. Face à cette inexécution, A décide de résoudre le contrat et d'acheter les bananes à un autre producteur. Toutefois, avant que la restitution n'intervienne, un cyclone de grande envergure détruit tous les entrepôts du port et entraine la perte des bananes. L'entreprise A n'est pas responsable de la perte des marchandises, elle ne perd pas son droit de résoudre le contrat et ne sera pas tenue de restituer la prestation à l'entreprise B.

4. La liquidation de l'état de possession du débiteur à la restitution

Conformément au paragraphe quatre de la règle ici proposée, la liquidation de l'état de possession du débiteur à la restitution se fera au regard des critères suivantes. En premier lieu, le débiteur de la restitution est tenu de rendre, soit in natura soit par équivalent, les fruits et les bénéfices perçus de la chose, mais pas ceux qu'il aurait dû percevoir. En second lieu, il a droit au remboursement des frais qu'il aurait engagé pour la conservation du bien. Et en troisième lieu, les autres frais seront remboursés s'ils constituent un enrichissement pour le destinataire de la restitution.

De telles règles ne sont pas étrangères aux systèmes juridiques caribéens de tradition romano-germanique et entrainent l'application de la théorie de l'enrichissement sans cause ou de la rétroactivité de la résolution. Dans les systèmes d'origine anglaise, le premier critère serait probablement appliqué si le créancier de la restitution subissait un préjudice du fait de l'inexécution du contrat [Planché v Colburn (1831), 8 Bing 14], ou dans les cas de rupture [section 1 du Law Reform (Frustrated Contracts) Act : article 20 du Contract Act du Bélize : section 3 du Law Reform (Frustated contracts) Act de la Jamaïque : et section 6 du Law Reform (Misrepresentation and Frustated contract des Bermudas]. Mais si celui qui réclame la restitution est coupable de l'inexécution, il n'a pas droit au paiement des bénéfices [Sumpter v Hedges (1989), 1 QB 673]. En droit anglo-américain, le vendeur qui est en possession de biens qui ont été à juste titre refusés (pour défaut de conformité avec les termes du contrat) est traité comme un simple dépositaire, avec une obligation de veiller raisonnablement sur la chose en vue de sa conservation [section 36 du Sale of Goods Act anglais : section 37 du Sale of Goods Act des Bahamas, de Montserrat, d'Antigua-et-Barbuda et de Trinité-et-Tobago : section 38 du Sale of Goods Act du Bélize : section 36 du Sale of Goods Act de la Jamaïque : section 2-602 (b) et (c) UCC]. En droit anglais, cela constitue sa seule obligation. Toutefois, en droit étasunien si l'acheteur est un commerçant, cela peut lui être imposé dans des circonstances particulières y compris l'obligation de procéder à la revente des biens (section 2-603 UCC).

5. Droits des tiers

Cette règle vise seulement à régir les relations entre les parties et ne s'intéresse pas aux droits des tiers relatifs aux biens objet du contrat concerné par la résolution. Pour le droit des tiers, il faut s'en remettre aux droits nationaux applicables. Par exemple, l'éventuelle existence d'un tiers acquéreur le protège par le fait que la résolution du contrat ne peut pas lui porter préjudice.

Commentaire

Article 7.3.5

Cumul avec des dommages-intérêts

La résolution n'exclut pas le droit de réclamer des dommages-intérêts pour inexécution si des préjudices subsistent après la résolution. Néanmoins, le débiteur n'est pas responsable des pertes subies par le créancier dans la mesure où celui-ci aurait pu les réduire en prenant des mesures raisonnables.

Face à l'inexécution du contrat, la partie lésée pourra utiliser pour la défense de son droit tous les remèdes qu'elle jugera pertinents, à condition qu'ils ne soient pas incompatibles entre eux [article 7.1.3 (2) des Principes OHADAC]. Concrètement, le droit de résoudre le contrat et l'attribution de dommages et intérêts sont des moyens compatibles.

C'est la solution retenue par la common law, qui prévoit que l'inexécution par l'une des parties de la prestation convenue au contrat (primary obligation) fait naitre l'obligation secondaire au versement d'une indemnisation pour les dommages occasionnés par l'inexécution (secondary obligation: to pay damages). De même, dans les systèmes juridiques d'origine romano-germanique la règle générale est la compatibilité des remèdes [article 1.546.2 du code civil colombien : article 692 du code civil costaricain : article 306 du code civil cubain : article 1.184.2 des codes civils dominicain et français : article 1.535.2 du code civil guatémaltèque : 974.2 du code civil haïtien : article 6:277 des codes civils néerlandais et surinamais : article 1.386.2 du code civil hondurien : article 1.949.2 du code civil mexicain : article 1.885.2 du code civil nicaraguayen : article 1.009.2 du code civil panaméen : article 1.077.2 du code civil portoricain : article 1.167 du code civil vénézuélien : articles 45 et 61 CVIM : articles 7.3.5 et 7.4.1. PU : article 8:103 PECL : article III-3:102 et III.-3:502 DCFR). Tous les systèmes s'accordent sur la condition préalable selon laquelle la résolution pour inexécution ne doit pas avoir été causée par un cas de force majeure.

Il existe plus de problème en droit comparé sur la question de savoir si le dommage résolutoire doit être d'intérêt positif (intérêt de l'exécution) ou d'intérêt négatif (intérêt de confiance). Dans les modèles appliquant le modèle rétroactif, il peut y avoir une antinomie si le créancier peut se prévaloir de l'intérêt positif mais que, toutefois, la résolution a des effets ex tunc. La règle admise est l'indemnisation de l'intérêt contractuel positif et c'est également l'option retenue par le droit néerlandais (article 6:277 des codes civils néerlandais et surinamais : positief contractsbelang).

En droit anglo-américain, l'intérêt positif est protégé, puisque l'objectif est de placer la partie lésée dans la même situation que si le contrat avait été exécuté [« so far as money can do it (...) in the same situation (...) as if the contract had been performed »]. Toutefois, s'il le souhaite, le créancier lésé pourra opter pour l'intérêt négatif (reliance loss), mais jamais pour les deux cumulativement. La limite de la combinaison des demandes (loss of bargain, reliance loss and restitution) est posée par le principe interdisant la double couverture pour un même préjudice (principle against double recovery).

En droit uniforme, la règle générale consiste en l'indemnisation de l'intérêt positif [article 74 CVIM : article 7.4.2 (1) PU : article 9:502 PECL : article III.-3:702 DCFR : article 160 CESL].

L'article ici proposé a opté pour une règle ouverte, sans établir si l'intérêt indemnisable est positif ou négatif, laissant entre l'un ou l'autre le choix qui conviendra le mieux à la partie lésée.

Il est important de ne pas confondre la demande de dommages et intérêt avec la possibilité de réclamer des sommes qui, au regard du commentaire de l'article précédent, découle de la non rétroactivité de la résolution, sachant que ces sommes ne seront dues que si elles l'étaient avant la résolution du contrat.

Exemple : Si dans un contrat de vente il est convenu que l'acheteur remet une somme d'argent à titre d'acompte (versement ferme), et si le contrat est résolu précisément pour défaut de paiement de l'acompte, le vendeur pourra demander : a) l'acompte pour la somme convenue et due avant la résolution, et b) les dommages et intérêts pour le préjudice causé par l'inexécution du contrat.

Enfin, la partie lésée doit atténuer les dommages et intérêts, c'est-à-dire qu'elle ne pourra pas demander une indemnité pour les pertes qui auraient pu être évitées par une prestation de remplacement, par exemple, si celle-ci était possible (commentaire sous l'article 7.4.3 Principes OHADAC).

Commentaire

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