PRINCIPES OHADAC RELATIFS AUX CONTRATS DU COMMERCE INTERNATIONAL

Article 7.3.1

Droit à la résolution du contrat

1. Une partie peut résoudre le contrat en cas d'inexécution essentielle de la part de l'autre partie.

2. Une partie peut également résoudre le contrat en cas d'inexécution non essentielle de la part de l'autre partie, après l'expiration du délai supplémentaire accordé conformément à l'article 7.1.6 et si l'autre partie n'a toujours pas exécuté ou corrigé l'inexécution de l'obligation, à moins que les conséquences soient de faible importance.

1. La configuration de la résolution en cas d'inexécution selon un modèle objectif

Dans tous les systèmes juridiques, la résolution est la conséquence de l'obligation synallagmatique. Ainsi, dans les contrats bilatéraux ou réciproques, chaque partie est tenue d'exécuter sa prestation à condition de recevoir ce qui lui a été promis. Par conséquent, face à l'inexécution de l'autre partie, la partie lésée a droit de se libérer de sa propre obligation. Toutefois, la possibilité de résoudre le contrat en cas d'inexécution se heurte au principe cardinal du droit des contrats : pacta sunt servanda. Pour cette raison, et pour d'autres d'ordre pratique et économique, les différents systèmes juridiques posent plus ou moins d'obstacles et de conditions à l'action en résolution.

La différence entre les modèles subjectifs ou objectifs de l'inexécution dans les systèmes de la zone de la Caraïbe repose sur la recherche ou non du motif de l'inexécution.

Dans les systèmes fondés sur la faute, la résolution prend la forme d'une sanction (résolution-sanction de droit privé), et est conçue comme un reproche fait au comportement négligent et dolosif du débiteur défaillant, alors que les cas d'inexécution non fautive sont ramenés à la théorie des risques (p. ex. articles 1.068-1.072 du code civil panaméen : article 1.344 du code civil vénézuélien). Par contre, dans les systèmes anglo-saxons, le caractère fautif ou non de l'inexécution ne conditionne pas le droit ou non de résoudre le contrat (dans le même sens, article 6:265.1 des codes civils néerlandais et surinamais).

Dans le droit uniforme, la tendance objective prédomine. Dans les PU, le créancier insatisfait a le droit de résoudre le contrat indépendamment du caractère fautif ou non de l'inexécution (articles 7.3.1 et s.). De manière similaire, la CVIM reconnait à la partie lésée par l'inexécution le droit d'agir en résolution à condition que les conditions requises soient remplies (inexécution essentielle), indépendamment de son caractère fautif (articles 45 et 61).

Pour leur part, les PECL et le DCFR, alors qu'ils retiennent le concept unitaire et objectif de l'inexécution, traitent des cas d'inexécution dus à un empêchement total et permanent dont le débiteur ne peut être tenu pour responsable, et pour lesquels le contrat se trouve automatiquement résolu [articles 9.303 (4) PECL et III-3:104 (4) DCFR]. Dans la même ligne, figure l'article 126 de l'avant-projet de réforme du droit français des obligations de 2013.

Cette dernière solution est celle que les Principes OHADAC ont préféré adopter en écho à d'autres droits en vigueur dans la région, et selon lesquels il sera « automatiquement mis fin » au contrat en cas d'impossibilité d'exécution pour cause de force majeure (article 7.1.8 des présents Principes). Le concept objectif de la résolution pour inexécution est retenu et il sera ipso iure dans ce cas (paragraphe quatre de l'article 7.1.8), et ne concernera les cas spécifiques d'une cause justificative que pour le régime de la résolution.

2. L'inexécution grave ou essentielle ou l'octroi d'un délai supplémentaire comme conditions de la résolution

La majorité des systèmes de tradition romaniste, sous l'influence de l'article 1.184 du code civil français, conçoivent la résolution pour inexécution comme une condition résolutoire implicite dans les contrats bilatéraux ou synallagmatiques, en cas de défaillance de l'une des parties (article 1.546 du code civil colombien : article 692 du code civil costaricain : article 1.184 du code civil dominicain : article 1.535 du code civil guatémaltèque : article 974 du code civil haïtien : articles 1.386 du code civil et 747 du code de commerce honduriens : article 1.949 du code civil mexicain : article 1.885 du code civil nicaraguayen : article 1.009 du code civil panaméen : article 1.077 du code civil portoricain : article 141 du code de commerce vénézuélien). Font exception à la règle, l'article 306 du code civil cubain qui considère la résolution comme étant l'une des causes d'extinction des obligations et l'article 1.167 du code civil vénézuélien, qui la considère comme l'un des effets du contrat, comme un effet particulier des contrats bilatéraux. Et la majorité des codes du commerce ne la régit pas, non plus, en tant que condition résolutoire implicite, mais comme un remède général (article 870 du code de commerce colombien) ou seulement pour des contrats spécifiques (p. ex. articles 973 et 1.325 du code de commerce colombien : article 463 du code de commerce costaricain : article 329 du code civil cubain : article 711 du code civil guatémaltèque : article 376 du code de commerce mexicain : article 759 du code de commerce panaméen : article 250 du code civil portoricain)

Du fait que la résolution ne figure pas comme le remède à proprement parler face à l'inexécution, les codes hérités des droits français et espagnol n'en délimitent pas les conditions en exigeant positivement, par exemple, une inexécution essentielle. Toutefois, cette condition a été posée par la doctrine et la jurisprudence fondée sur l'équité (arrêt de la Cour Suprême de Justice de Colombie du 18 décembre 2009, Exp. 41001-3103-004-1996-09616-01 : du 22 octobre 2003, Exp. 7451 : et du 11 septembre 1984, Gaceta Judicial, tome 176, n° 2415). L'avant-projet de réforme du droit français des obligations s de 2013 (article 132) établit également que la gravité de l'inexécution est une condition pour obtenir la résolution.

Traditionnellement, les systèmes anglais et étatsunien (et les systèmes sous leur influence) ont mis en place des filtres pour éviter le recours injustifié à la résolution. Dans leur approche classique, ces droits divisent les clauses contractuelles en conditions et warranties, et octroient seulement à la partie lésée par l'inexécution des premières le droit de résoudre le contrat (p. ex., suivant le régime de la section 53 du Sale of Goods Act anglais : section 53 du Sale of Goods Act des Bahamas, de Montserrat, d'Antigua-et-Barbuda et de Trinité-et-Tobago, utilisant une formulation identique : et sections 52 et 54 du Sale of Goods Act de la Jamaïque et du Bélize, respectivement).

Il est également permis à une partie au contrat de résoudre le contrat (même si ce n'est pas en présence d'une condition), en cas d'une renunciation ou repudiation du contrat par l'autre partie. Le débiteur « répudie » un contrat dès lors qu'il manifeste par son comportement ou verbalement son intention de ne pas exécuter son obligation ou s'il déclare expressément qu'il lui sera impossible d'exécuter les termes essentiels de sa prestation.

Toutefois, la classification rigoureuse des contractual terms s'assouplissent par la voie judiciaire et législative et donc, dans certains cas, les juges estiment que la clause est de type « intermédiaire » (intermediate ou innominate term), et autorise la résolution en se fondant sur le caractère sufficently serious de l'inexécution et sur la gravité des conséquences pour le créancier [Hong-Kong Fir Shipping Co Ltd v Kawasaki Kisen Kaisha Ltd (1962), 2 QB 26]. L'introduction d'une troisième catégorie de clauses contractuelles sert à mettre l'accent sur les conséquences de l'inexécution, bien qu'un tel transfert de critère est davantage formel que matériel. Donc d'un point de vue historique et pratique, par principe pour considérer que l'inexécution permet la résolution, il faut qu'elle soit grave, c'est-à-dire que ses conséquences affectent de manière sérieuse le résultat ou le bénéfice que le créancier espérait obtenir du contrat. Ce principe est connu sous le nom de substancial failure in performance pour les territoires dépendant des États-Unis [Article 2, Partie 7 : Remedies UCC : sections 241 et 242 du Restatement Second of Contracts].

Dans les codes civils néerlandais et surinamais, le filtre utilisé pour éviter des résolutions fantaisistes est la technique du Nachfrist. Ainsi, même si l'exécution est encore possible, le créancier ne peut pas déclarer le contrat résolu sans mettre préalablement le débiteur en demeure (article 6:265.2 des codes civils néerlandais et surinamais). Par conséquent, le créancier devra enjoindre le débiteur de s'exécuter en lui octroyant un délai supplémentaire. Et ce n'est qu'une fois que ce délai aura expiré sans que l'exécution ait été réalisée que la résolution pourra intervenir. La mise en demeure n'est pas exigée ni le délai supplémentaire si les parties ont convenu d'un terme essentiel (fatale termijn). De même, la résolution est possible sans délai si l'exécution de la prestation est temporairement ou définitivement impossible, sans qu'il ne soit important de savoir si cela est dû à une force majeure ou à une faute. Quant à la limite relative à l'inexécution, le présent article écarte la résolution dès lors que l'inexécution « au regard de sa nature ou de son importance mineure, ne justifie pas la résolution et les effets qu'elle entraine ».

Dans le même sens, le droit uniforme combine l'inexécution essentielle (fundamental breach) et la technique du Nachfrist. Ce régime de résolution figure aux articles 49 et 64 CVIM, 7.3.1 PU : 9:301 PECL, III-3:502 DCFR, et 114 et 134 CESL.

Les Principes OHADAC, suivant cette ligne d'inspiration, adoptent une solution qui, bien qu'elle ne soit pas retenue dans certains droits nationaux, ne leur est toutefois pas étrangère. La possibilité de résoudre le contrat est reconnue à la partie qui n'a pas obtenu satisfaction du fait de toute inexécution, y compris le retard et l'exécution défectueuse. En présence d'une inexécution essentielle prévue à l'article 7.1.2 ou dans une clause prévue par les parties au contrat, le créancier lésé pourra résoudre le contrat sans avoir besoin d'octroyer un délai supplémentaire au débiteur, qui n'a pas de sens dans cas. Mais si l'exécution continue d'être possible et utile (inexécution non essentielle, soit pour retard soit pour défaut de prestation), le créancier pourra octroyer un délai supplémentaire afin de lui donner une dernière chance pour exécuter son obligation. Le régime prévu à l'article 7.1.6 implique que le créancier ait le droit de résoudre le contrat à l'expiration du délai imparti, même s'il s'agit d'une inexécution non essentielle. Toutefois, une correction est introduite afin d'éviter que la partie contractante opportuniste n'utilise ce moyen de résolution pour se sortir d'une mauvaise affaire, en invoquant une inexécution de faible importance. Pour cette raison, il est prévu qu'il ne pourra pas agir en résolution dès lors que l'inexécution est de moindre importance, une exception, comme cela a été indiqué, qui est contenue également à l'article 6:265 des codes civils néerlandais et surinamais et dans la Directive 1999/44/CE (article 3.6).


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